pres psychologique, auquel s'applique le heros au debut du livre
sixieme, nous montre la droiture lumineuse, l'elevation sereine des
idees, compatibles avec les consequences pratiques les plus arides et
les plus ameres. L'impuissance de la philosophie solitaire en face des
maux reels y est vivement mise a nu, et la tentative de suicide par ou
finit Cleveland exprime pour nous et conclut visiblement cette moralite
plus profonde, j'ose l'assurer, qu'elle n'a du alors le sembler a son
auteur. Quant au _Doyen de Killerine_, le dernier en date des trois
grands romans de Prevost, c'est une lecture qui, bien qu'elle languisse
parfois et se prolonge sans discretion, reste en somme infiniment
agreable, si l'on y met un peu de complaisance. Ce bon doyen de
Killerine, passablement ridicule a la maniere d'Abraham Adams, avec ses
deux bosses, ses jambes crochues et sa verrue au front, tuteur cordial
et embarrasse de ses freres et de sa jolie soeur, me fait l'effet d'une
poule qui, par megarde, a couve de petits canards; il est sans cesse
occupe d'aller de Dublin a Paris pour ramener l'un ou l'autre qui
s'ecarte et se lance sur le grand etang du monde. Ce genre de vie,
auquel il est si peu propre, l'engage au milieu des situations les plus
amusantes pour nous, sinon pour lui, comme dans cette scene de boudoir
ou la coquette essaye de le seduire, ou bien lorsque, remplissant un
role de femme dans un rendez-vous de nuit, il recoit, a son corps
defendant, les baisers passionnes de l'amant qui n'y voit goutte. L'abbe
Desfontaines, dans ses _Observations sur les Ecrits modernes_, parmi de
justes critiques du plan et des invraisemblances de cet ouvrage, s'est
montre de trop severe humeur contre l'excellent doyen, en le traitant
de personnage plat et d'homme aussi insupportable au lecteur qu'a
sa famille. Pour sa famille, je ne repondrais pas qu'il l'amusat
constamment; mais nous qui ne sommes pas amoureux, le moyen de lui en
vouloir quand il nous dit: "Je lui prouvai par un raisonnement sans
replique que ce qu'il nommoit amour invincible, constance inviolable,
fidelite necessaire, etoient autant de chimeres que la religion et
l'ordre meme de la nature ne connoissoient pas dans un sens si badin?"
Malgre les demonstrations du doyen, les passions de tous ces jolis
couples allaient toujours et se compliquaient follement; l'aimable Rose,
dans sa logique de coeur, ne soutenait pas moins a son frere Patrice
qu'en depit du sort qui le separait de s
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