u'en janvier. Si le calorifere n'est pas pret, peut-etre Madame
ira quelques jours a Cannes chez la duchesse de Guise, mais ce n'est pas
encore sur.
--Et au theatre, est-ce que vous y allez?
--Nous allons quelquefois a l'Opera, quelquefois aux soirees
d'abonnement de la princesse de Parme, c'est tous les huit jours; il
parait que c'est tres chic ce qu'on voit: il y a pieces, opera, tout.
Madame la Duchesse n'a pas voulu prendre d'abonnements mais nous y
allons tout de meme une fois dans une loge d'une amie a Madame, une
autre fois dans une autre, souvent dans la baignoire de la princesse de
Guermantes, la femme du cousin a Monsieur le Duc. C'est la soeur au duc
de Baviere.
--Et alors vous remontez comme ca chez vous, disait le valet de pied
qui, bien qu'identifie aux Guermantes, avait cependant des _maitres_ en
general une notion politique qui lui permettait de traiter Francoise
avec autant de respect que si elle avait ete placee chez une duchesse.
Vous etes d'une bonne sante, madame.
--Ah! ces maudites jambes! En plaine encore ca va bien (en plaine
voulait dire dans la cour, dans les rues ou Francoise ne detestait pas
de se promener, en un mot en terrain plat), mais ce sont ces satanes
escaliers. Au revoir, monsieur, on vous verra peut-etre encore ce soir.
Elle desirait d'autant plus causer encore avec le valet de pied qu'il
lui avait appris que les fils des ducs portent souvent un titre de
prince qu'ils gardent jusqu'a la mort de leur pere. Sans doute le culte
de la noblesse, mele et s'accommodant d'un certain esprit de revolte
contre elle, doit, hereditairement puise sur les glebes de France, etre
bien fort en son peuple. Car Francoise, a qui on pouvait parler du genie
de Napoleon ou de la telegraphie sans fil sans reussir a attirer son
attention et sans qu'elle ralentit un instant les mouvements par
lesquels elle retirait les cendres de la cheminee ou mettait le couvert,
si seulement elle apprenait ces particularites et que le fils cadet du
duc de Guermantes s'appelait generalement le prince d'Oleron, s'ecriait:
"C'est beau ca!" et restait eblouie comme devant un vitrail.
Francoise apprit aussi par le valet de chambre du prince d'Agrigente,
qui s'etait lie avec elle en venant souvent porter des lettres chez la
duchesse, qu'il avait, en effet, fort entendu parler dans le monde du
mariage du marquis de Saint-Loup avec Mlle d'Ambresac et que c'etait
presque decide.
Cette villa, cette baignoire, ou Mme de
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