loi de
quiconque se respecte de ne jamais deroger. Sieyes, si haut place qu'il
fut dans sa propre idee et dans celle des autres, n'a pas toujours fait
de la sorte. La Notice ecrite par lui sur lui-meme (1794), et que La
Fayette discute, est, ainsi que celui-ci la qualifie avec raison, plus
acre que vraie sur bien des points. Sieyes dedie ironiquement sa
Notice _a la Calomnie_, mais lui-meme n'y epargne pas les imputations
calomnieuses ou injurieuses contre son ancien collegue a la
Constituante, pour lors prisonnier de la Coalition. La Fayette prend
avec reserve et dignite sa revanche de ces aigreurs, et il triomphe
legitimement a la fin, lorsque, sans cesser de se contenir, il s'ecrie:
"Il n'appartient point a mon sujet d'examiner la troisieme epoque de
la vie politique de Sieyes [82]. Je suis encore plus loin de chercher a
attaquer ses moyens de justification, et je me suis contente d'admirer
les pages eloquentes ou il nous peint le regne de l'anarchie et de la
Terreur. A Dieu ne plaise que je cherche a appuyer l'horrible accusation
de complicite avec Robespierre, dont il est si justement indigne! a Dieu
ne plaise que je me permette d'y croire! mais il est une observation que
je dois faire, parce qu'elle est commandee par mon amour inalterable
pour la liberte, par le sentiment profond que j'ai des devoirs d'un
citoyen, et surtout d'un representant francais. L'accusation dont on a
voulu souiller Sieyes est inique; elle est fausse, et neanmoins il a
merite qu'on la fit. Je ne parle pas de cet ancien propos: "_Ce n'est
pas la noblesse qu'il faut detruire, mais les nobles_," propos que
la calomnie peut avoir invente; je ne parle pas d'autres inductions,
peut-etre aussi mensongeres, que la haine, la jalousie, et meme le
malheur peuvent avoir ou controuvees ou exagerees; je parle de sa
_simple assiduite aux seances qui, bien loin d'etre utile_ [83], ne put
qu'etre funeste a la chose publique, lorsque le silence d'un homme tel
que lui semblait autoriser les decrets contre lesquels il ne s'elevait
pas. Vingt-deux girondins, la plupart ses amis, ont peri sur l'echafaud
pour s'etre opposes a ces decrets. Plusieurs autres, et nommement
Condorcet, ont expie des torts precedents par une proscription cruelle,
fruit de leur resistance, et par une mort plus cruelle encore. Il n'y a
pas jusqu'a Danton et Desmoulins qui n'aient eu l'honneur de mourir pour
s'opposer a Robespierre. Tallien et Bourdon, en parlant contre l'infame
loi du 2
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