ssures,
rendre hommage aux martyrs de la bonne cause, seraient pour moi des
jouissances qui dilateraient encore mon coeur; mais je suis plus degoute
que jamais, je le suis invinciblement de prendre racine dans les
affaires publiques; je n'y entrerais que pour un coup de collier, comme
on dit, et rien, rien au monde, je vous le jure sur mon honneur, par
ma tendresse pour vous et par les manes de ce que nous pleurons, ne me
persuadera de renoncer au plan de retraite que je me suis forme et dans
lequel nous passerons tranquillement le reste de notre vie." Mais s'il
est loin de les avoir tenues a la lettre, il semble s'etre toujours
souvenu de ces paroles et ne s'etre jamais trop departi du sentiment
qu'il y exprime. Si l'on excepte, en effet, sa longue campagne
politique sous la Restauration, durant laquelle il combattit a son rang
d'opposition avancee, comme c'etait le devoir de tous les amis des
libertes publiques, il ne parut jamais en tete et hors de ligne que pour
un _coup de collier_. Et alors, comme on l'a vu en 1830, il avait une
hate extreme de se decharger: Qu'on en finisse, et que les droits de
l'humanite soient saufs!--C'est ainsi que son experience acquise se
concilia du mieux qu'elle put avec son inalterable faculte d'esperer et
avec sa foi morale et sociale persistante.
On trouvera dans la lettre a M. de Maubourg, dont je ne saurais assez
signaler l'interet et l'importance, l'_arriere-pensee_ finale de
La Fayette (si je l'ose appeler ainsi), et l'explication de son
_prenez-y-garde_ dans ces moments decisifs ou, plus tard, il s'est
trouve a portee de tout. Cette lettre demontre de plus, a mes yeux, que
ce qui arriva, a partir du 8 aout 1830, ne dejoua pas l'idee interieure
de La Fayette autant que lui-meme le crut et le ressentit. Il
ecrivait en 1799: "Les uns esperent que la persecution m'aura un peu
aristocratise; les autres m'identifient a la royaute constitutionnelle,
et les republicains disent qu'a present je serai pour la republique
comme j'etais pour elle dans les Etats-Unis. Mais toutes ces idees ne
sont que secondaires, parce que reellement "la masse nationale n'est
ni royaliste, ni republicaine, ni rien de ce qui demande une reflexion
politique; elle est contre les jacobins, contre les conventionnels,
contre ceux qui regnent depuis que la republique a ete etablie; elle
veut etre debarrassee de tout cela, fut-ce par la contre-revolution,
mais prefere s'arreter a quelque chose de constitutionnel; ell
|