egalement, jamais il ne donnera ses
enfants!
--Tu as pourtant des droits sur eux. Tu n'as commis aucune faute que la
loi puisse atteindre?
--Non! Je le jure par mes enfants et par toi; mais ce sera un proces, un
scandale, au lieu d'etre une formalite que le consentement mutuel
rendrait tres-facile. D'ailleurs, je ne sais pas si leur loi protestante
n'attribue pas les fils au mari. Je ne sais rien, je ne me suis jamais
informee. Mes principes me defendent d'accepter le divorce, et je n'ai
jamais cru que Valvedre en viendrait la!
--Mais que veux-tu donc faire de tes enfants? lui dis-je, impatiente de
cette exaltation maternelle qui ne se reveillait devant moi que pour me
blesser. Sois donc sincere vis-a-vis de toi-meme, tu n'en aimes qu'un,
l'aine, et c'est justement celui qui, sous toutes les legislations,
appartient au pere, a moins qu'il n'y ait danger moral a le lui confier,
et ce n'est point ici le cas. D'ailleurs, de quoi te tourmentes-tu,
puisqu'en restant la femme de Valvedre, tu n'en as pas moins perdu a ses
yeux le droit de les elever... et meme de les promener? Le divorce ne
changera donc rien a ta situation, car aucune loi humaine ne t'otera le
droit de les voir.
--C'est vrai, dit Alida en se levant, pale, les cheveux epars, les yeux
brillants et secs. Eh bien, alors que faisons-nous?
--Tu ecris a ton mari que tu demandes le divorce, et nous partons; nous
attendons le temps legal apres la dissolution du mariage, et tu consens
a etre ma femme.
--Ta femme? Mais non, c'est un crime! Je suis mariee et je suis
catholique!
--Tu as cesse de l'etre le jour ou tu as fait un mariage protestant.
D'ailleurs, tu ne crois pas en Dieu, ma belle, et ce point-la doit lever
bien des scrupules d'orthodoxie.
--Ah! vous me raillez! s'ecria-t-elle, vous ne parlez pas serieusement!
--Je raille ta devotion, c'est vrai; mais, pour le reste, je parle si
serieusement, qu'a l'instant meme je t'engage ma parole d'honnete
homme...
--Non! ne jure pas! C'est par orgueil, ce que tu veux faire, ce n'est
pas par amour! Tu hais mon mari au point de vouloir m'epouser, voila
tout.
--Injuste coeur! Est ce donc la premiere fois que je t'offre ma vie?
--Si j'acceptais, dit-elle en me regardant d'un air de doute, ce serait
a une condition.
--Dis! dis vite!
--Je ne veux rien accepter de M. de Valvedre. Il est genereux, il va
m'offrir la moitie de son revenu; je ne veux meme pas de la pension
alimentaire a laquelle j'ai
|