nt de la consoler et de lui persuader qu'elle
reverrait bientot ses enfants.
--Non, va! je ne les reverrai plus, repondit la pauvre malade: c'est la
le chatiment le plus cruel que Dieu put m'infliger, et je sens que je le
merite.
--Prenez garde, madame, dit Bianca, votre decouragement fait tant de mal
a ce pauvre jeune homme!
--Il est donc la?
--Mais je crois que oui, dit Bianca en s'approchant du seuil de l'autre
chambre.
Je m'etais jete par hasard sur un fauteuil a dossier fort eleve. Bianca,
ne me voyant pas, crut que j'etais sorti, et retourna aupres de sa
maitresse en lui disant que j'allais certainement rentrer, et qu'il
fallait etre calme.
--Eh bien, quand tu l'entendras rentrer, dit Alida, tu me feras signe,
et je feindrai de dormir. Il se console et se rassure encore un peu
quand il s'imagine que j'ai dormi. Laisse-moi te parler, Bianchina; cela
me soulage, nous sommes si peu seules! Ah! ma pauvre enfant, toi-meme,
tu ne sais pas ce que je souffre et quels remords me tuent! Depuis que
j'ai tout quitte pour ce bon Francis, mes yeux se sont ouverts, et je
suis devenue une autre femme. J'ai commence a croire en Dieu et a
prendre peur; j'ai senti qu'il allait me punir et qu'il ne me
permettrait pas de vivre dans le mal.
Bianca l'interrompit.
--Vous ne faites point de mal, dit-elle; je n'ai jamais vu de femme
aussi vertueuse que vous! Et vous auriez tous les droits possibles
pourtant, avec un mari si egoiste et si indifferent!...
--Tais-toi, tais-toi! reprit Alida avec une force febrile; tu ne le
connais pas! tu n'es que depuis trois ans a mon service, tu ne l'as vu
que longtemps deja apres ma premiere infidelite de coeur et quand il ne
m'aimait plus. Je l'avais bien merite!... Mais, jusqu'a ces derniers
temps, j'ai cru qu'il ne savait rien, qu'il n'avait rien daigne savoir,
et que, ne pouvant pas me juger indigne de lui, son coeur s'etait retire
de moi par lassitude. Je lui en voulais donc, et, sans songer a mes
torts, je m'irritais des siens. Mes torts! je n'y croyais pas; je disais
comme toi: "Je suis si vertueuse au fond! et j'ai un mari si
indifferent!" Sa douceur, sa politesse, sa liberalite, ses egards, je
les attribuais a un autre motif que la generosite. Ah! pourquoi ne
parlait-il pas? Un jour enfin... Tiens, c'est aujourd'hui le meme jour
de l'annee!... il y a un an... Je l'ai entendu parler de moi et je n'ai
pas compris, j'etais folle! Au lieu d'aller me jeter a ses pieds, je me
suis
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