mme s'il m'eut presente a elle:
--Voici votre ami, lui dit-il, l'ami devoue a qui vous voulez temoigner
votre gratitude. Tout ce que vous m'avez dit de ses soins et de son
affection absolue justifie votre desir de lui serrer la main, et je ne
suis pas venu ici pour l'eloigner de vous dans un moment ou toutes les
personnes qui vous sont attachees veulent et doivent vous le prouver.
C'est une consolation pour vos souffrances, et vous savez que je vous
apporte tout ce que mon coeur vous doit de tendresse et de sollicitude.
Ne craignez donc rien, et, si vous avez quelques ordres a donner qui
vous semblent devoir etre mieux executes par d'autres que moi, je vais
me retirer.
--Non, non, repondit Alida en le retenant d'une main pendant qu'elle
s'attachait a moi de l'autre; ne me quittez pas encore!... Je voudrais
mourir entre vous deux, lui qui a tout fait pour sauver ma vie, vous qui
etes venu pour sauver mon ame!
Puis, se soulevant sur nos bras et nous regardant tour a tour avec une
expression de terreur desesperee, elle ajouta:
--Vous etes ainsi devant moi pour que je meure en paix; mais a peine
serai-je sous le suaire, que vous vous vous battrez!
--Non! repondis-je avec force, cela ne sera pas, je le jure!
--Je vous entends, monsieur, dit Valvedre, et je connais vos intentions.
Vous m'offrirez votre vie, et vous ne la defendrez pas. Vous voyez bien,
ajouta-t-il en s'adressant a sa femme, que nous ne pouvons pas nous
battre. Rassurez-vous, _ma fille_, je ne ferai jamais rien de lache. Je
vous ai donne ma parole, ici, tout a l'heure, de ne pas me venger de
celui qui s'est devoue a vous corps et ame dans ces ameres epreuves, et
je n'ai pas deux paroles.
--Je suis tranquille, repondit Alida en portant a ses levres la main de
son mari. Oh! mon Dieu! vous m'avez donc pardonne!... Il n'y a que mes
enfants... mes enfants que j'ai negliges..., abandonnes..., mal aimes
pendant que j'etais avec eux..., et qui ne recevront pas mon dernier
baiser... Chers enfants! pauvre Paul! Ah! Valvedre, n'est-ce pas que
c'est une grande expiation et qu'a cause de cela tout me sera pardonne?
Si vous saviez comme je les ai adores, pleures! comme mon pauvre coeur
inconsequent s'est dechire dans l'absence! comme j'ai compris que le
sacrifice etait au-dessus de mes forces, et comme Paul, celui qui me
rendait triste, qui me faisait peur, que je n'osais pas embrasser, m'est
apparu beau et bon et a jamais regrettable dans mes heures d'agonie!
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