r un mauvais sentiment a commettre une
mauvaise action!
--Oui, je le sais! Je ne veux pas inaugurer ma prise de possession par
un eclat. C'est pour te parler de ces choses que j'ai voulu te voir;
mais je dois te prier, quelle que soit ton opinion, de me menager. Je ne
suis pas aussi maitre de moi-meme que s'il s'agissait de faire une
analyse botanique!
--Ni moi non plus, reprit Obernay; mais je tacherai pourtant de ne pas
perdre la tete. Pourquoi m'as-tu appele? Parle, je t'ecoute.
--Oui, je vais parler; mais je veux savoir ce que contenait le billet
que madame de Valvedre t'a fait porter a son mari. Il a du te le
montrer.
--Oui. Il contenait ceci en propres termes: "J'accepte l'_ultimatum_. Je
pars! D'accord avec vous, je demande le divorce, et, selon vos desirs,
je compte me remarier."
--C'est bien, c'est tres-bien! m'ecriai-je soulage d'une vive anxiete:
j'avais craint un instant qu'Alida n'eut deja change d'intention et
trahi les serments de l'enthousiasme.--A present, repris-je, tu le vois,
tout est consomme! Je vais enlever cette femme, et, aussitot qu'elle
sera libre devant la loi, elle sera ma femme. Tu vois que la question
est nettement tranchee.
--La chose ne peut pas se passer ainsi, dit Henri froidement. Tant que
le divorce n'est pas prononce, M. de Valvedre ne veut pas qu'elle soit
compromise. Il faut qu'elle retourne a Valvedre, ou que tu t'eloignes.
C'est un peu de patience a avoir, puisque la realisation de votre
fantaisie ne peut souffrir d'empechement. Craignez-vous deja de vous
raviser l'un ou l'autre, si vous ne brulez pas vos vaisseaux par un coup
de tete?
--Point d'epigrammes, je te prie. L'avis de M. de Valvedre est fort
raisonnable a coup sur; mais il m'est impossible de le suivre. Il a
lui-meme cree l'empechement en me gratifiant de ses dedains, de ses
railleries et de ses menaces.
--Ou cela? quand cela donc?
--Sous la tonnelle de ton jardin, il y a une heure.
--Ah! tu etais la? tu ecoutais?
--M. de Valvedre n'avait aucun doute a cet egard.
--Au fait... oui, je me rappelle! Il tenait a parler la. J'aurais du
deviner pourquoi. Eh bien, apres? Il a parle de son rival, non pas comme
d'un homme raisonnable, ce qui eut ete bien impossible, mais comme d'un
honnete homme, et, ma foi...
--C'est plus que je ne merite selon toi?
--Selon moi? Peut-etre! nous verrons! Si tu te conduis en ecervele, je
dirai que tu es encore trop enfant pour avoir bien compris ce que c'est
qu
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