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rangerent en bataille a mesure qu'elles arrivaient. Les Anglais auxquels
on ne donna pas le temps de revenir de leur premiere frayeur, reculerent
et ensuite tournerent le dos: on les poursuivit l'epee dans les reins
jusqu'a Saintes ou plusieurs Francais, emportes par leur ardeur et par
la foule, entrerent meles avec eux, et furent faits prisonniers. Cette
action se passa la veille de la Magdelaine de l'annee 1242.
Apres cette deroute, le roi d'Angleterre, qui n'avait que tres-peu de
troupes reunies, les autres etant dispersees par leur fuite, etait au
moment d'etre enveloppe dans la campagne, et d'etre fait prisonnier.
Le comte Richard voyant le peril auquel le roi son frere etait expose,
trouva le moyen de l'en garantir. Il savait que le roi de France
l'estimait, qu'il avait de l'amitie pour lui, et que les grands services
qu'il avait rendus dans la Palestine a plusieurs seigneurs francais,
en les tirant des mains des Infideles, lui avaient acquis une grande
consideration a la cour de France. Il quitta son casque et sa cuirasse;
il s'avanca vers l'armee francaise, n'ayant qu'une canne a la main,
et demanda a parler au comte d'Artois, frere du roi. Le comte s'etant
avance, et l'ayant recu avec beaucoup de civilite, Richard le pria de le
conduire au roi. Ce prince, que la moderation n'abandonna jamais, meme
au sein de la victoire, fit beaucoup de caresses a Richard, et l'assura
de la disposition ou il etait de lui donner toute satisfaction. Richard
le supplia de lui accorder une suspension d'armes pour le reste de la
journee et jusqu'au lendemain. Le roi, toujours porte a la paix, lui
accorda sa demande, et lui dit ces paroles en le congediant:
"Monsieur le comte, la nuit porte avis, donnez-en un salutaire au roi
d'Angleterre, et faites en sorte qu'il le suive." Le roi voulait lui
faire entendre qu'il devait conseiller a Henri de faire une bonne paix
avec la France, et de se departir de la protection qu'il donnait a des
rebelles contre leur souverain. Mais Richard pensa d'abord a mettre la
personne du roi son frere en surete. Il piqua vers le lieu ou il etait,
et lui ayant appris qu'il avait obtenu une suspension d'armes pour le
reste du jour et pour la nuit, il le pressa de partir, et de se retirer
dans la ville de Saintes: ce qu'il fit sans tarder, avec ce qu'il avait
pu recueillir de ses troupes. Il y trouva le comte de la Marche, qui
etait aussi afflige que lui de cette malheureuse journee. Il lui parla
avec be
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