ne amie... intellectuelle, au
sejour de Paris, nuisible a sa sante. Or, Musset entendait trouver dans
son amie mieux que l'amour d'une seconde mere. On sait que tous les
amants de Lelia s'entendirent appeler ses enfants...
Si Musset se sentait de l'orgueil, elle en avait, elle en laissait voir
plus que lui. Et, sa dignite toujours en avant, elle ne savait abdiquer
le souci constant d'un labeur qui assurait l'independance de sa vie.
Quoique _gendelettres_ tous deux, mais plus poetes qu'artistes, ils n'en
restaient pas moins jeunes et sinceres. Leurs lettres n'ont pas ete
ecrites pour la posterite; elles n'en sont que plus curieuses pour elle.
Les courts fragments cites par Mme Arvede Barine dans sa penetrante
monographie de Musset[6], avaient fait pressentir les perles que
recelait ce terreau... melange. Pour la premiere fois, on va pouvoir
juger de cette correspondance. Elle nous guidera dans l'expose du plus
fameux des romans d'amour. Mais reprenons-le a ses origines pour en
mieux preciser l'evolution.
[Note 6: Les grands ecrivains francais: _Alfred de Musset_, in-18,
Hachette, 1894.]
II
La liaison de George Sand avec Jules Sandeau vient de finir,--comme
finiront tous les amours de Lelia. Elle n'est que desenchantee, quand
Lui emporte une secrete blessure. Rarement il la devoilera, au cours de
sa longue carriere. C'est un silencieux. Mais s'il n'en veut pas donner
confidence au public, chaque fois qu'il lui arrivera d'y faire allusion,
ce sera d'un mot dont la cruaute breve suspend tout jugement sur l'etre
d'exception qu'a ete George Sand.--"Le coeur de cette femme est comme un
cimetiere, a-t-il dit, on n'y rencontre que les croix de ceux qu'elle a
aimes."
Leur liaison a dure trois ans. Quant a elle, elle est rassasiee de
l'amour. Ses amis, que la presence de Sandeau n'avait pas rebutes, se
rapprochent. Ils ont tout credit chez elle et plus d'autorite que jamais
sur sa vie. Avec le fidele Boucoiran, le precepteur intermittent de son
fils, un etre bon et faible qui est et restera toujours "son enfant",
son meilleur ami est Gustave Planche.
Du jour ou elle fut sans amant, il est a supposer qu'il espera son tour.
Il connaissait George Sand depuis ses debuts a Paris. De quatre ans plus
jeune qu'elle, il prenait bientot cependant, sur son ardent esprit,
par un gout d'austere puriste et des connaissances qu'elle declarait
infinies, un de ces ascendants qu'elle rechercha toujours et dont si
merveilleusemen
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