bien
accueilli. Il est heureux. Le jeudi 1er aout, toutes les harpes de la
joie chantent dans son coeur:
Te voila revenu dans mes nuits etoilees,
Bel ange aux yeux d'azur, aux paupieres voilees,
Amour, mon bien supreme et que j'avais perdu!
J'ai cru pendant trois ans te vaincre et te maudire,
Et toi, les yeux en pleurs, avec ton doux sourire,
Au chevet de mon lit te voila revenu.
Eh bien! deux mots de toi m'ont fait le roi du monde.
Mets la main sur mon coeur, la blessure est profonde;
Elargis-la, bel ange, et qu'il en soit brise!
Jamais amant aime, mourant pour sa maitresse,
N'a, dans des yeux plus noirs, bu la celeste ivresse,
Nul, sur un plus beau front ne t'a jamais baise.
George Sand n'ose encore se croire, se proclamer
heureuse. Sa lettre du 3 aout a Sainte-Beuve
est beaucoup plus calme que les precedentes.
Sans lui avouer pourtant son nouveau
bonheur, elle lui laisse entendre que le jeune
soleil de l'esperance n'est pas loin.
Son confesseur lui a fait part des alternatives
de son bonheur a lui, de son mysterieux amour.
Ils veulent s'epancher mutuellement en confidences;
mais George Sand entend ne causer
de jalousie a personne:
....Tout ceci peut se faire par lettres; je ne veux pas que, pour m'etre
utile et agreable, vous compromettiez ce qu'il y a de plus beau et de
plus sacre dans votre existence. Qui, moi! prendre un egoiste plaisir
qui peut briser un coeur devoue! Non, non, je respecte trop l'amour,
_l'Amour_ comme vous ecrivez. Quoique j'en medise souvent, comme je fais
de mes plus saintes convictions aux heures ou le demon m'assiege, je
sais bien qu'il n'y a que cela au monde de beau et de sacre... Si
j'avais une grande peine, un subit besoin d'appui et de conseils, je
vous appellerais [42].
[Note 42: _Revue de Paris_ du 15 nov. 1896, p. 287.]
_Lelia_ vient de paraitre. Naturellement, le premier exemplaire en est
offert a Musset. Il porte cette double dedicace: sur le tome Ier: _A
Monsieur mon gamin d'Alfred,_ GEORGE; sur le tome II: _A Monsieur le
vicomte Alfred de Musset, hommage respectueux de son devoue serviteur,_
GEORGE SAND[43].
[Note 43: Ce precieux exemplaire est en la possession de la
gouvernante]
Ils sont heureux. Aucun nuage ne trouble encore cet azur. Alfred de
Musset s'est installe chez George Sand.
Parmi les habitues de sa mansarde, il a trouve Boucoiran et Gustave
Planche. Les allures un peu bien familieres de ces deu
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