ui-ci. Pagello, attriste
par les souffrances du pauvre jaloux, aurait demande a George Sand de
lui pardonner. Elle y aurait consenti "par faiblesse et imprudence",
ne croyant pas au repentir, ne sachant elle-meme ce que c'est que le
repentir! Elle eut prefere tout avouer a Alfred; il eut d'abord beaucoup
pleure, puis se fut calme. Elle ne l'eut revu qu'a l'heure de partir
pour la France; elle l'y eut accompagne et on se fut separe amicalement
a Paris.
Pagello apparait ici comme un honnete coeur qui a pu envisager chez
son amie un complet pardon de l'amant trahi,--le pardon de l'amour
peut-etre. Mais elle ne sait etre genereuse: quand on l'a offensee et
qu'elle a dit qu'elle n'aimait plus, c'est bien fini. "Ma conduite peut
etre magnanime, mon coeur ne peut pas etre misericordieux. Je suis trop
bilieuse, ce n'est pas ma faute. Je puis servir Alfred par devoir ou par
honneur; mais lui pardonner par amour, ce m'est impossible."
Elle poursuit, dans ces sophismes de la passion et de l'orgueil, en
expliquant a Pagello quelle soumission elle espere de lui...
Mais la singuliere amoureuse interrompt ses remontrances pour declarer a
son amant qu'il reunit a ses yeux toutes les perfections.
C'est la premiere fois, lui dit-elle, qu'elle aime sans souffrir au bout
de trois jours. Elle se sent jeune encore; son coeur n'est pas use. Ici,
un hymne sensuel d'une etonnante vigueur, qu'attriste pour finir, comme
une ombre importune, la vision toujours presente de l'autre amour
qu'elle veut croire a son declin.--Voici ce document decisif:
Aurons-nous assez de prudence et assez de bonheur, toi et moi, pour
lui cacher encore notre secret pendant un mois? Les amants n'ont pas
de patience et ne savent pas se cacher. Si j'avais pris une chambre
dans l'auberge, nous aurions pu nous voir sans le faire souffrir et
sans nous exposer a le voir d'un moment a l'autre devenir furieux. Tu
m'as dit de lui pardonner; la compassion que me causaient ses larmes
ne me portait que trop a suivre ton conseil; mais ma raison me dit que
ce pardon etait un acte de faiblesse et d'imprudence, et que j'aurais
bientot sujet de m'en repentir. Son coeur n'est pas mauvais et sa
fibre est tres sensible; mais son ame n'a ni force ni veritable
noblesse. Elle fait de vains efforts pour se maintenir dans la dignite
qu'elle devrait avoir--Et puis, vois-tu, moi, je ne crois pas au
repentir. Je ne sais pas ce que c'est. Jamais je n'ai eu sujet
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