a publie une lettre de Mme Edmee de
Musset au poete (du 13 fevrier 1834), toute pleine de son angoisse,
_Revue de Paris_, article cite p. 713.]
"Apres six semaines sans nouvelles, Paul etait alle voir Buloz qui lui
avait montre une lettre de George Sand, ou elle disait Alfred tres
malade. Alors Paul avait songe a partir pour l'Italie; il m'en fit la
confidence. Mais notre mere voulait savoir ce que George Sand avait
ecrit a Buloz. N'y tenant plus, elle courut chez lui. Il repondit
evasivement: il avait egare la lettre; il la lui enverrait.... Enfin,
nous recumes d'Alfred cette lettre navree que Paul a citee dans la
_Biographie_."
Alfred de Musset avait ecrit regulierement aux siens, jusqu'au milieu de
fevrier. Quand il tomba malade, il chargea George Sand de donner de ses
nouvelles a sa mere. Il affirma toujours qu'elle l'avait fait. Aucune
de ces lettres, presque quotidiennes disaient-ils, ne parvint a
destination, alors que Buloz recut toutes celles qu'on lui ecrivait[123].
[Note 123: On a donne cette explication: que le gondolier a qui
etaient remises, avec l'argent du pour le port, les lettres adressees a
Mme de Musset, les jetait dans la lagune. Quant aux lettres a Buloz et a
ses amis, George Sand les portait elle-meme a la poste....]
La lettre si longtemps esperee du poete justifia l'inquietude des
siens.--"Le pauvre garcon, a peine releve d'une fievre cerebrale,
parlait de se trainer, comme il pourrait, jusqu'a la maison. Car il
voulait s'eloigner de Venise des qu'il aurait assez de forces pour
monter dans une voiture.
"Je vous apporterai, disait-il, un corps malade, une ame abattue, un
coeur en sang, mais qui vous aime encore."
"Il devait la vie aux soins devoues de deux personnes qui n'avaient
point quitte son chevet jusqu'au jour ou la jeunesse et la nature
avaient vaincu le mal.
"Pendant de longues heures, il etait reste dans les bras de la mort; il
en avait senti l'etreinte, plonge dans un etrange aneantissement. Il
attribuait en partie sa guerison a une potion calmante, que lui avait
administree a propos un jeune medecin de Venise, et dont il voulait
conserver l'ordonnance. "C'est un puissant narcotique, ajoutait-il; elle
est amere, comme tout ce qui m'est venu de cet homme: comme la vie
que je lui dois." Cette ordonnance existe, en effet, dans les papiers
d'Alfred de Musset. Elle est signee _Pagello_[124]."
[Note 124: PAUL DE MUSSET, _Biographie_, p. 125.]
Nous savons dans quel etat le
|