nce et de
l'indulgence pour quelques moments de peur et de tristesse que
j'aurai encore sans doute. Cette patience-la n'est guere de ton age.
Consulte-moi, mon ange, ma vie t'appartient et, quoi qu'il arrive, sache
que je t'aime et t'aimerai.
_De Lui_: Quitte-moi, toi, si tu veux. Tant que tu m'aimeras, c'est de
la folie. Je n'en aurai jamais la force. Ecris-moi un mot. Je donnerais
je ne sais quoi pour t'avoir la. Si je puis me lever j'irai te voir.
_De Lui_: Je t'aime, je t'aime, je t'aime. Adieu, o mon George. C'est
donc ainsi, je t'aime pourtant. Adieu, adieu, ma vie, mon bien; adieu
mes levres, mon coeur, mon amour. Je t'aime tant, o Dieu!
Adieu. Toi, toi, toi, ne te moque pas d'un pauvre homme.
_D'Elle:_ Tout cela, vois-tu, c'est un jeu que nous jouons. Mais notre
coeur et notre vie seront l'enjeu et ce n'est pas tout a fait aussi
plaisant que cela en a l'air. Veux-tu que nous allions nous bruler la
cervelle ensemble a Franchart? Ce sera plus tot fait!... Elle songe
reellement a ramener Musset dans cette foret de Fontainebleau ou ils
furent si heureux jadis. Une amie qu'elle a la-bas, Rosanne Bourgoin,
leur sera l'apaisement souhaite. Mais non! Il faut se separer une fois
pour toutes. Il faut s'en donner le courage.--Une fatalite pesait sur
cet amour: tous deux se debattaient dans une detresse invincible.
Descendez, descendez, lamentables victimes, Descendez le chemin de
l'enfer eternel...
Le poete comprit que la situation etait sans issue. Excede de cette
passion epuisante, il resolut de partir.--Le l0 novembre, il l'annonce
a George Sand, ajoutant qu'il n'aura meme pas le courage d'attendre son
depart a elle. Il veut neanmoins qu'elle accorde a "son pauvre vieux
lierre" une derniere entrevue, un dernier souvenir.
Le 12 novembre, il ecrit au vigilant Tattet dont il sait l'influence si
redoutee de Celle qu'il veut fuir: "Tout est fini.--Si par hasard on
vous faisait quelques questions, si peut-etre on allait vous voir pour
vous demander a vous-meme si vous ne m'avez pas vu, repondez purement
que non et soyez sur que notre secret commun est bien garde de ma
part[134]..." Et il va en Bourgogne, a Montbard, se reposer chez un de ses
parents.
[Note 134: Lettre publiee par M. Clouard, article cite, p. 734.]
De son cote, George Sand est partie pour Nohant. Elle y eprouve comme
lui un sentiment de delivrance. Son ami Boucoiran, qui a su la rupture,
l'en felicite et elle lui repond: "Je ne vais pas mal,
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