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d'adaptations faites d'apres nos pieces. Et le pis est que le theatre
est la-bas plus chatre encore que le roman. Les Anglais, a la scene, ne
tolerent plus la moindre etude humaine un peu serieuse. Ils tournent
tout a la romance, a une certaine honnetete conventionnelle. De la, a
coup sur, la mediocrite ou s'agite leur litterature dramatique. Ils
sont tombes au melodrame, et ils tomberont plus bas, car on tue une
litterature, lorsqu'on lui interdit la verite humaine. N'est-il pas
curieux et triste que le genie anglais, qui a eu dans les siecles passes
la floraison des plus violents temperaments d'ecrivains, ne donne
plus naissance, a la suite d'une certaine evolution sociale, qu'a des
ecrivains emascules, qu'a des bas bleus qui ne valent pas Ponson
du Terrail? Et cela juste a l'heure ou l'esprit d'observation et
d'experience emporte notre siecle a l'etude et a la solution de tous les
problemes.
Nous nous trouvons donc devant une consequence de l'etat social, qu'il
serait trop long d'etudier. Remarquez que la convention dans les
personnages et dans les idees est d'autant plus singuliere que le public
anglais exige le naturalisme dans le monde exterieur. Il n'y a pas de
naturaliste plus minutieux ni plus exact que Dickens, lorsqu'il decrit
et qu'il met en scene un personnage; il refuse simplement d'aller au
dela de la peau, jusqu'a la chair. De meme, les decors sont merveilleux
a Londres, si les pieces restent mediocres. C'est ici un peuple
pratique, tres positif, exigeant la verite dans les accessoires, mais se
fachant des qu'on veut dissequer l'homme. J'ajouterai que le mouvement
philosophique, en Angleterre, est des plus audacieux, que le positivisme
s'y elargit, que Darwin y a bouleverse toutes les donnees anciennes,
pour ouvrir une nouvelle voie ou la science marche a cette heure. Que
conclure de ces contradictions? Evidemment, si la litterature anglaise
reste stationnaire et ne peut supporter la conquete du vrai, c'est que
l'evolution ne l'a pas encore atteinte, c'est qu'il y a des empechements
sociaux qui devront disparaitre pour que le roman et le theatre
s'elargissent a leur tour par l'observation et l'analyse.
J'en voulais venir a ceci, que nous n'avons pas a nous emouvoir des
opinions portees par le public anglais sur nos oeuvres dramatiques. Le
milieu litteraire n'est pas le meme a Paris qu'a Londres, heureusement.
Que les Anglais n'aient pas compris Musset, qu'ils aient juge M. Dumas
trop vrai, cela n'
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