reunissent le lendemain avec la plus brulante indignation.
Lanjuinais surtout, qui n'avait pris aucune part aux haines d'orgueil qui
divisaient les deux cotes de la convention, et a qui on pardonnait son
opiniatrete, parce qu'aucun ressentiment personnel ne semblait l'animer,
Lanjuinais arrive plein de chaleur et de resolution pour faire honte a
l'assemblee de sa faiblesse de la veille. A peine Osselin a-t-il demande
la lecture du decret et sa redaction definitive, pour qu'on puisse elargir
sur-le-champ les detenus, que Lanjuinais s'elance a la tribune, et demande
la parole pour soutenir que le decret est nul et n'a pas ete rendu. Des
murmures violens l'interrompent. "Accordez-moi du silence, dit-il a la
gauche, car je suis decide a rester ici jusqu'a ce que vous m'ayez
entendu." On ne veut entendre Lanjuinais que sur la redaction du decret;
cependant, apres des epreuves douteuses, il est decide que, dans le doute,
il sera entendu. Il s'explique alors, et soutient que la question qui
s'agite est l'une des plus importantes pour la surete generale. "Plus de
cinquante mille citoyens, dit-il, ont ete enfermes dans toute la France
par vos commissaires; on a fait plus d'arrestations arbitraires en un mois
que sous l'ancien regime dans un siecle, et vous vous plaignez de ce qu'on
ait enferme deux ou trois hommes qui prechent le meurtre et l'anarchie a
deux sous la feuille? Vos commissaires sont des proconsuls qui agissent
loin de vos yeux, et que vous laissez agir; et votre commission, placee a
cote de vous, sous votre surveillance immediate, vous vous en defiez, vous
la supprimez! Dimanche dernier, on a propose dans la Jacobiniere de faire
un massacre dans Paris, on recommence ce soir la meme deliberation a
l'Eveche, on vous en fournit les preuves, on vous les offre, et vous les
repoussez! Vous protegez les hommes de sang!"
Le trouble eclate a ces paroles et couvre la voix de Lanjuinais. "On ne
peut plus deliberer, s'ecrie Chambon, il n'y a plus qu'a nous retirer dans
nos departements.--On assiege vos portes, reprend Lanjuinais.--C'est faux,
crie la gauche.--Hier, ajoute Lanjuinais de toutes ses forces, vous
n'etiez pas libres, vous etiez maitrises par les predicateurs du meurtre."
Legendre, de sa place, elevant alors la voix, dit: "On veut nous faire
perdre la seance; je declare que si Lanjuinais continue a mentir, je vais
le jeter a bas de la tribune." A cette scandaleuse menace, l'assemblee se
souleve, et les tribunes appl
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