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sparut. Je ne me risquai pas a regarder de l'autre cote. Les mobiles ranges le long du rempart tiraient toujours, et quelques-unes de leurs balles arrivaient dans le clos ou nous restions accroupis; mais les Prussiens nous donnaient trop de besogne pour qu'aucun de nous eut le temps de s'occuper de ce qui se passait derriere lui. Une violente detonation cependant me fit tourner la tete: c'etait le canon, dont un premier coup avait attire l'attention des batteries prussiennes, qui envoyait des paquets de mitraille aux maisons voisines pour en deloger les Bavarois. Des cartouches de chassepot lui avaient fourni la poudre et les balles. A la premiere decharge, les soldats a la veste bleue ou couverts de la lourde capote grise, sauterent comme des rats surpris par une explosion dans leur grenier. Les plus agiles bondissaient par-dessus les murs et les enclos; les plus fins ou les plus timides rampaient ca et la, profitant du moindre pan de muraille, des plis du terrain, des obstacles epars sur la route, pour dissimuler leur presence. D'autres, qui ne voulaient pas reculer, se faisaient un abri de quelque bout de haie ou d'une borne jetee a l'angle d'une maison, et continuaient a tirailler. Prussiens et Francais, nous etions tous en embuscade. Je n'avais qu'un petit nombre de cartouches, et je les menageais. Mes camarades et moi, nous n'echangions que de rares monosyllabes. Les yeux, les oreilles, les pensees, l'ame et le coeur, tout appartenait a la bataille. On voulait tuer, tuer encore, toujours tuer. Du bout du fusil, on cherchait sa proie; on avait des joies subites et des sourires nerveux quand un corps tombait et augmentait la ceinture de cadavres qui bordait la palissade. On m'avait parle de la fievre epouvantable que donne la chasse a l'homme: j'en avais l'abominable feu dans les veines. IV Nous ne savions rien de la bataille, dont les bruits retentissaient depuis le matin. Un horizon de fumee nous entourait; mais on comprenait, a la violence des detonations, qu'elle se rapprochait de plus en plus. Nous sentions vaguement que l'armee allait etre prise dans Sedan. Elle s'y engouffrait lentement. Autour des remparts, des tourbillons d'hommes s'agitaient pele-mele, les cavaliers avec les fantassins. On y voyait les regiments s'eparpiller et se dissoudre. Un coup de clairon nous rappela sur les remparts; il y avait deux heures que je brulais de la poudre. Deux heures apres, un coup de clairon me renvoya a
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