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donne a ses bagages le temps de passer, il evacua la position pendant la
nuit, repassa sur la rive gauche, et s'achemina vers Strasbourg.
Ainsi finit cette campagne celebre, et cette retraite plus celebre
encore. Le resultat indique assez le vice du plan. Si, comme l'ont
demontre Napoleon, l'archiduc Charles et le general Jomini, si au
lieu de former deux armees, s'avancant en colonnes isolees, sous deux
generaux differens, dans l'intention mesquine de deborder les flancs de
l'ennemi, le directoire eut forme une seule armee de cent soixante mille
hommes, dont un detachement de cinquante mille aurait assiege Mayence,
et dont cent dix mille, reunis en un seul corps, auraient envahi
l'Allemagne par la vallee du Rhin, le Val-d'Enfer et la Haute-Baviere,
les armees imperiales auraient ete reduites a se retirer toujours, sans
pouvoir se concentrer avec avantage contre une masse trop superieure.
Le beau plan du jeune archiduc serait devenu impossible, et le drapeau
republicain aurait ete porte jusqu'a Vienne. Avec le plan donne, Jourdan
etait une victime forcee. Aussi sa campagne, toujours malheureuse, fut
toute de devouement, soit lorsqu'il franchit le Rhin la premiere fois,
pour attirer a lui les forces de l'archiduc, soit lorsqu'il s'avanca
jusqu'en Boheme et qu'il combattit a Wurtzbourg. Moreau seul, avec sa
belle armee, pouvait reparer en partie les vices du plan, soit en se
hatant d'ecraser tout ce qui etait devant lui, au moment ou il deboucha
par Kehl, soit en se rabattant sur l'archiduc Charles, lorsque celui-ci
se porta sur Jourdan. Il n'osa ou ne sut rien faire de tout cela; mais
s'il ne montra pas une etincelle de genie, si a une manoeuvre decisive
et victorieuse il prefera une retraite, du moins il deploya dans cette
retraite un grand caractere et une rare fermete. Sans doute elle n'etait
pas aussi difficile qu'on l'a dit, mais elle fut conduite neanmoins de
la maniere la plus imposante.
Le jeune archiduc dut au vice du plan francais une belle pensee, qu'il
executa avec prudence; mais, comme Moreau, il manqua de cette ardeur,
de cette audace, qui pouvaient rendre la faute du gouvernement francais
mortelle pour ses armees. Concoit-on ce qui serait arrive, si d'un cote
ou de l'autre s'etait trouve le genie impetueux qui venait de detruire
trois armees au-dela des Alpes! Si les soixante-dix mille hommes de
Moreau, a l'instant ou ils deboucherent de Kehl, si les Imperiaux, a
l'instant ou ils quitterent le Dan
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