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Rampon, Pigeon, Menard, Chabrand, sont blesses. Nous sommes abandonnes
au fond de l'Italie: ce qui me reste de braves voit la mort infaillible,
au milieu de chances si continuelles, et avec des forces si inferieures.
Peut-etre l'heure du brave Augereau, de l'intrepide Massena, est pres de
sonner... Alors! alors que deviendront ces braves gens? Cette idee me
rend reserve, je n'ose plus affronter la mort, qui serait un sujet de
decouragement pour qui est l'objet de mes sollicitudes. Si j'avais recu
la quatre-vingt-troisieme, forte de trois mille cinq cents hommes connus
a l'armee, j'aurais repondu de tout! Peut-etre sous peu de jours, ne
sera-ce pas assez de quarante mille hommes!--Aujourd'hui, ajoutait
Bonaparte, repos aux troupes; demain, selon les mouvemens de l'ennemi,
nous agirons."
Cependant, tandis qu'il adressait ces plaintes ameres au gouvernement,
il affectait la plus grande securite aux yeux de ses soldats; il leur
faisait repeter, par ses officiers, qu'il fallait faire un effort, et
que cet effort serait le dernier; qu'Alvinzy detruit, les moyens de
l'Autriche seraient epuises pour jamais, l'Italie conquise, la paix
assuree, et la gloire de l'armee immortelle. Sa presence, ses paroles
relevaient les courages. Les malades, devores par la fievre, en
apprenant que l'armee etait en peril, sortaient en foule des hopitaux,
et accouraient prendre leur place dans les rangs. La plus vive et la
plus profonde emotion etait dans tous les coeurs. Les Autrichiens
s'etaient approches le jour meme de Verone, et montraient les echelles
qu'ils avaient preparees pour escalader les murs. Les Veronais
laissaient eclater leur joie en croyant voir, sous quelques heures,
Alvinzy reuni dans leur ville a Davidovich, et les Francais detruits.
Quelques-uns d'entre eux, compromis pour leur attachement a notre cause,
se promenaient tristement en comptant le petit nombre de nos braves.
L'armee attendait avec anxiete les ordres du general, et esperait a
chaque instant qu'il commanderait un mouvement. Cependant la journee du
24 s'etait ecoulee, et, contre l'usage, l'ordre du jour n'avait rien
annonce. Mais Bonaparte n'avait point perdu de temps; et, apres avoir
medite sur le champ de bataille, il venait de prendre une de ces
resolutions que le desespoir inspire au genie. Vers la nuit, l'ordre est
donne a toute l'armee de prendre les armes; le plus grand silence est
recommande; on se met en marche; mais au lieu de se porter en avant, on
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