a de bon, les principes de vertu,
les sentiments eleves, et les droits sentiers d'une conduite exacte que
l'habitude a les suivre lui a rendus faciles et naturels.
"Sa folie a toujours ete de vouloir dominer par la logique et la raison;
et, comme les femmes qui se sentent serrees dans leur corps s'imaginent
etre de belle taille, sa raison l'ayant incommodee, elle a cru en avoir
beaucoup. Toutefois elle n'a jamais pu surmonter la vivacite de son
humeur, ni l'assujettir du moins a quelque apparence d'egalite, ce qui
souvent l'a rendue desagreable a ses maitres, a charge dans la societe,
et tout a fait insupportable aux gens de sa dependance. Heureusement la
fortune ne l'a pas mise en etat d'en envelopper plusieurs dans cette
disgrace. Avec tous ces defauts, elle n'a pas laisse que d'acquerir
une veritable reputation, qu'elle doit uniquement a deux occasions
fortuites: l'une a mis au jour ce qu'elle pouvait avoir d'esprit, et
l'autre a fait remarquer en elle de la discretion et quelque fermete.
Ces evenements, ayant ete fort connus, l'ont fait connaitre elle-meme,
malgre l'obscurite ou sa condition l'avait placee, et lui ont attire une
consideration au-dessus de son etat. Elle a tache de n'en etre pas plus
vaine; mais deja la satisfaction qu'elle a de se croire exempte de
vanite en est une.
"Elle a rempli sa vie d'occupations serieuses, plutot pour fortifier
sa raison que pour orner son esprit, dont elle fait bon marche. Aucune
opinion ne se presente a son esprit avec assez de clarte pour qu'elle
s'y affectionne, et ne soit aussi prete a la rejeter qu'a la recevoir;
ce qui fait qu'elle ne disputa guere, si ce n'est par humeur. Elle a
beaucoup lu, et ne sait pourtant que ce qu'il faut pour entendre ce
qu'on dit sur quelque matiere que ce soit, et ne rien dire de mal a
propos. Elle a recherche avec soin la connaissance de ses devoirs et
les a respectes aux depens de ses gouts. Elle s'est autorisee du peu de
conplaisance qu'elle a pour elle-meme a n'en avoir pour personne; en
quoi elle suit son naturel inflexible, que sa situation a plie sans lui
faire perdre son ressort.
"L'amour de la liberte est sa passion dominante, passion tres
malheureuse en elle, qui a passe la plus grande partie de sa vie dans la
servitude; aussi son etat lui a-t-il toujours ete insupportable, malgre
les agrements inesperes qu'elle a pu trouver.
"Elle a toujours ete fort sensible a l'amitie, cependant plus touchee
du merite et de la vertu de s
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