s enfants, en criant au secours;
mais il s'agenouilla au milieu de la chambre, en me disant d'une voix
douce: "Comment est-il possible que vous ayez peur d'un homme qui
voudrait pouvoir vous prouver son devouement en mourant pour vous?--Je
ne sais qui vous etes, Monsieur, lui repondis-je d'une voix tremblante;
mais, a coup sur, vous etes bien insolent d'entrer ainsi dans ma
chambre; partez, partez! que je ne vous revoie jamais, ou j'avertirai
mon mari de votre conduite.--Non, dit-il en se rapprochant, vous ne
le ferez pas; vous aurez pitie d'un homme au desespoir." Je vis en ce
moment le bracelet, et l'idee me vint de le redemander. Je le fis d'un
ton d'autorite et en jurant que j'avais cru le jeter a mon mari. "Je
suis pret a vous obeir en tout, dit-il d'un air resigne; reprenez-le,
mais sachez que vous me reprenez le seul honneur et le seul espoir de ma
vie." Alors il s'agenouilla de nouveau tout pres de moi et me tendit son
bras. Je n'osais reprendre moi-meme le bracelet; il eut fallu toucher sa
main ou seulement son vetement, et je ne trouvais pas cela convenable.
Alors il crut que j'hesitais, car il me dit: "Vous avez compassion de
moi, vous consentez a me le laisser, n'est-ce pas, o ma chere Fernande!"
Et il saisit ma main, qu'il baisa plusieurs fois tres-insolemment. Je
me mis a crier, et des pas se firent entendre aussitot dans la galerie
voisine; mais avant que l'on eut le temps d'entrer, l'inconnu avait
disparu, comme un chat, par la fenetre.
Jacques et Sylvia frapperent alors a la porte, que j'avais fermee au
verrou et que je ne songeais plus a ouvrir, tout en leur criant d'entrer
au nom du ciel. Cette circonstance du verrou, qui se trouvait fatalement
liee a l'entree d'un homme dans ma chambre, m'empecha de raconter ce
qui s'etait passe; je dis que j'avais entendu le hautbois, que j'avais
envoye Rosette chercher de la lumiere, qu'elle m'avait enfermee par
megarde; que j'avais cru entendre du bruit dans ma chambre et que
j'avais perdu la tete. Comme on me tient pour folle de peur, on ne m'en
demanda pas davantage. Rosette assura bien avoir entendu le hautbois en
traversant la galerie, on fit quelques recherches dans la maison et dans
le jardin. On ne trouva personne, et on decreta, en riant, qu'on ferait
venir un piquet de gendarmerie pour me garder. Sylvia alla chercher
le dolman et le shako de Jacques, et s'en affubla avec de fausses
moustaches; elle se planta ainsi derriere moi le sabre en main,
affectant
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