perieur comme le votre, peut traiter avec le roi d'Espagne et
se reserver sa large part... Votre puissance est ruinee en Italie, votre
existence y est en peril. Avec l'appui de Philippe, vous pouvez vous
creer une souverainete qui, pour n'etre pas celle que vous avez revee,
n'en sera pas moins de nature a satisfaire une vaste ambition... Ce
parchemin, je vous le livre et je vous demande de consentir a le porter
a Philippe...
Aussitot la resolution de Fausta fut prise et, s'adressant au cardinal,
elle dit:
--Quand on s'appelle Peretti, on doit avoir assez d'ambition pour agir
pour son propre compte... Pourquoi avez-vous impose ma grace a Sixte?...
Pourquoi m'avez-vous empechee de mourir?... Pourquoi me faites-vous
entrevoir ce nouvel avenir de splendeur? Je vais vous le dire: parce que
vous m'aimez, cardinal.
Montalte tomba sur les genoux, tendit les mains dans un geste
d'imploration.
--Taisez-vous, cardinal. Ne prononcez pas d'irreparables paroles...
Mais, moi, je ne vous aimerai jamais.
--Pourquoi? Pourquoi? begaya Montalte.
--Parce que, dit-elle gravement, parce que j'aime, et que Fausta ne peut
concevoir deux amours.
Montalte se redressa, ecumant:
--Vous aimez?... Vous aimez?... et vous me le dites?...
--Oui, dit simplement Fausta.
--Vous aimez!... Qui?... Pardaillan, n'est-ce pas?...
Et Montalte, d'un geste de folie, tira sa dague.
Fausta, immobile dans son lit, le regardait d'un oeil tres calme, et,
d'une voix qui glaca Montalte, elle dit:
--Vous l'avez dit: j'aime Pardaillan... Mais croyez-moi, cardinal
Montalte, laissez votre dague... Si quelqu'un doit tuer Pardaillan, ce
n'est pas vous, c'est moi...
--Pourquoi? hurla Montalte.
--Parce que je l'aime, repondit froidement Fausta.
V
LA DERNIERE PENSEE DE SIXTE-QUINT
Apres le depart de son neveu, Sixte-Quint, assis devant sa table de
travail, demeura longtemps songeur.
Il fut tire de sa reverie par l'entree d'un secretaire qui vint, a voix
basse, lui dire que le comte Hercule Sfondrato sollicitait avec instance
la faveur d'une audience particuliere, ajoutant que le comte paraissait
violemment emu.
Le nom d'Hercule Sfondrato, brusquement jete dans sa meditation, fut
comme un trait de lumiere pour le pape qui murmura:
--Voila l'homme que je cherchais! Faites entrer le comte Sfondrato,
ajouta-t-il a haute voix.
Un instant apres, le grand juge, les traits bouleverses, entrait d'un
pas rude, se campait devant le pap
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