utte se prolonge entre le moi, plein de fierte, et
l'accroissement terrible de la catalepsie, l'esprit hallucine perd le
jugement? Ronge par le desespoir, il se complait dans son mal, jusqu'a
ce qu'il ait vaincu la nature, et que le sommeil, voyant sa proie lui
echapper, s'enfuie sans retour loin de son coeur, d'une aile irritee et
honteuse. Jetez un peu de cendre sur mon orbite en feu. Ne fixez pas mon
oeil qui ne se ferme jamais. Comprenez-vous les souffrances que
j'endure? (cependant, l'orgueil est satisfait). Des que la nuit exhorte
les humains au repos, un homme, que je connais, marche a grands pas dans
la campagne. Je crains que ma resolution ne succombe aux atteintes de la
vieillesse. Qu'il arrive, ce jour fatal ou je m'endormirai! Au reveil
mon rasoir, se frayant un passage a travers le cou, prouvera que rien
n'etait, en effet, plus reel.
* * * * *
--Mais qui donc!... mais qui donc ose, ici, comme un conspirateur,
trainer les anneaux de son corps vers ma poitrine noire? Qui que tu
sois, excentrique python, par quel pretexte excuses-tu ta presence
ridicule? Est-ce un vaste remords qui te tourmente? Car, vois-tu, boa,
ta sauvage majeste n'a pas, je le suppose, l'exorbitante pretention
de se soustraire a la comparaison que j'en fais avec les traits du
criminel. Cette bave ecumeuse et blanchatre est, pour moi, le signe de
la rage. Ecoute-moi: sais-tu que ton oeil est loin de boire un rayon
celeste? N'oublie pas que si ta presomptueuse cervelle m'a cru capable
de t'offrir quelques paroles de consolation, ce ne peut etre que par
le motif d'une ignorance totalement depourvue de connaissances
physiognomoniques. Pendant un temps, bien entendu, suffisant, dirige la
lueur de tes yeux vers ce que j'ai le droit, comme un autre, d'appeler
mon visage! Ne vois-tu pas comme il pleure? Tu t'es trompe, basilic. Il
est necessaire que tu cherches ailleurs la triste ration de soulagement,
que mon impuissance radicale te retranche, malgre les nombreuses
protestations de ma bonne volonte. Oh! quelle force, en phrases
exprimables, fatalement t'entraina vers ta perte? Il est presque
impossible que je m'habitue a ce raisonnement que tu ne comprennes pas
que, plaquant sur le gazon rougi, d'un coup de mon talon, les courbes
fuyantes de ta tete triangulaire, je pourrais petrir un innommable
mastic avec l'herbe de la savane et la chair de l'ecrase.
--Disparais le plus tot possible loin de moi, coupable a la
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