s fermer les yeux, afin d'attendre son ennemi de pied
ferme. Mais, chaque fois, ne prend-il pas la meme resolution, et
n'est-elle pas toujours detruite par l'inexplicable image de sa promesse
fatale? Il ne dit plus rien, et se resigne avec douleur; car, pour lui
le serment est sacre. Il s'enveloppe majestueusement dans les replis de
la soie, dedaigne d'entrelacer les glands d'or de ses rideaux, et,
appuyant les boucles ondulees de ses longs cheveux noirs sur les franges
du coussin de velours, il tate, avec la main, la large blessure de son
cou, dans laquelle la tarentule a pris l'habitude de se loger, comme
dans un deuxieme nid, tandis que son visage respire la satisfaction. Il
espere que cette nuit actuelle (esperez avec lui!) verra la derniere
representation de la succion immense; car, son unique voeu serait que
le bourreau en finit avec son existence: la mort, et il sera content.
Regardez cette vieille araignee de la grande espece, qui sort lentement
sa tete d'un trou place sur le sol, a l'une des intersections des angles
de la chambre. Nous ne sommes plus dans la narration. Elle ecoute
attentivement si quelque bruissement remue encore ses mandibules dans
l'atmosphere. Helas! nous sommes maintenant arrives dans le reel, quant
a ce qui regarde la tarentule, et, quoique l'on pourrait mettre un point
d'exclamation a la fin de chaque phrase, ce n'est peut-etre pas une
raison pour s'en dispenser! Elle s'est assuree que le silence regne aux
alentours; la voila qui retire successivement des profondeurs de son
nid, sans le secours de la meditation, les diverses parties de son
corps, et s'avance a pas comptes vers la couche de l'homme solitaire. Un
instant elle s'arrete; mais il est court, ce moment d'hesitation. Elle
se dit qu'il n'est pas temps encore de cesser de torturer, et qu'il faut
auparavant donner au condamne les plausibles raisons qui determinerent
la perpetualite du supplice. Elle a grimpe a cote de l'oreille de
l'endormi. Si vous voulez ne pas perdre une seule parole de ce qu'elle
va dire, faites abstraction des occupations etrangeres qui obstruent le
portique de votre esprit, et soyez, au moins, reconnaissant de l'interet
que je vous porte, en faisant assister votre presence aux scenes
theatrale qui me paraissent dignes d'exciter une veritable attention
de votre part; car, qui m'empecherait de garder, pour moi seul, les
evenements que je raconte? "Reveille-toi, flamme amoureuse des anciens
jours, squelette decharn
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