ans
son tartan ecossais, il retourne chez ses parents. C'est huit heures et
demie, et il espere arriver chez lui a neuf heures: de sa part, c'est
une grande presomption que de feindre d'etre certain de connaitre
l'avenir. Quelque obstacle imprevu ne peut-il l'embarrasser dans sa
route? Et cette circonstance, serait-elle si peu frequente, qu'il dut
prendre sur lui de la considerer comme une exception? Que ne
considere-t-il plutot, comme un fait anormal, la possibilite qu'il a eue
jusqu'ici de se sentir depourvu d'inquietude et pour ainsi dire heureux?
De quel droit en effet pretendrait-il gagner indemne sa demeure, lorsque
quelqu'un le guette et le suit par derriere comme sa future proie? (Ce
serait bien peu connaitre sa profession d'ecrivain a sensation, que de
ne pas, au moins, mettre en avant, les restrictives interrogations apres
lesquelles arrive immediatement la phrase que je suis sur le point de
terminer.) Vous avez reconnu le heros imaginaire qui, depuis un long
temps, brise par la pression de son individualite ma malheureuse
intelligence! Tantot Maldoror se rapproche de Mervyn, pour graver dans
sa memoire les traits de cet adolescent; tantot, le corps rejete en
arriere, il recule sur lui-meme comme le boomerang d'Australie, dans la
deuxieme periode de son trajet, ou plutot, comme une machine infernale.
Indecis sur ce qu'il doit faire. Mais, sa conscience n'eprouve aucun
symptome d'une emotion la plus embryogenique, comme a tort vous le
supposeriez. Je le vis s'eloigner un instant dans une direction opposee:
etait-il accable par le remords? Mais, il revint sur ses pas avec un
nouvel acharnement. Mervyn ne sait pas pourquoi ses arteres temporales
battent avec force, et il presse le pas, obsede par une frayeur dont lui
et vous cherchent vainement la cause. Il faut lui tenir compte de son
application a decouvrir l'enigme. Pourquoi ne se retourne-t-il pas? Il
comprendrait tout. Songe-t-on jamais aux moyens les plus simples de
faire cesser un etat alarmant? Quand un rodeur de barrieres traverse un
faubourg de la banlieue, un saladier de vin blanc dans le gosier et la
blouse en lambeaux, si, dans le coin d'une borne, il apercoit un vieux
chat musculeux, contemporain des revolutions auxquelles ont assiste nos
peres, contemplant melancoliquement les rayons de la lune, qui
s'abattent sur la plaine endormie, il s'avance tortueusement dans une
ligne courbe, et fait signe a un chien cagneux, qui se precipite. Le
noble animal
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