our tous les habitants
de l'Ange-Gardien; les enfants jouerent, souperent de bon appetit et se
coucherent de bonne heure, fatigues de leur journee et surtout de la
nuit precedente. Moutier continua ses bons offices a Mme Blidot et a
sa soeur pour le service des rares voyageurs qui s'arretaient pour se
rafraichir et se reposer. Quand les enfants furent couches, il resta
a causer avec elles sur ce qu'il convenait de faire pour ces pauvres
petits abandonnes. MOUTIER.--Ils ont encore leur pere, d'apres ce que
m'a raconte Jacques, mais comment le retrouver? Je ne peux seulement pas
savoir son nom ni l'endroit ou il demeurait quand les gendarmes l'ont
emmene. Peut-etre est-il en prison ou au bagne pour quelque grosse faute
qu'il aura commise. Peut-etre vaut-il mieux pour eux ne pas connaitre
leur pere; mais il faut tout de meme que demain, avant de partir,
j'aille faire ma declaration a la mairie; on pourrait arriver par la a
savoir quel nom leur faire porter. Si le maire vient vous interroger,
vous direz la simple verite. Je vous laisserai mon adresse pour que vous
puissiez me faire savoir les nouvelles en cas de besoin.
MADAME BLIDOT.--Mais vous ne serez pas sans revenir pour en avoir par
vous-meme, monsieur Moutier; car je considere ces enfants comme restant
sous votre protection et vous appartenant plus qu'a moi.
MOUTIER.--J'en serais bien embarrasse si je les avais, ma bonne madame
Blidot; ils sont mieux places chez vous que chez moi, qui n'ai pas de
domicile ni d'autres moyens d'existence que mes deux bras. Mais voila
qu'il se fait tard; ma journee a commence avant le jour, et je ne serais
pas fache d'en voir la fin.
MADAME BLIDOT.--Que ne le disiez-vous plus tot? Je vous aurais mene a
votre chambre, qui est ici pres, au rez-de-chaussee, donnant sur le
jardin. Ma soeur et moi, nous couchons la-haut, c'est plus sur pour deux
femmes seules; non pas que le pays soit mauvais, mais si quelque mauvais
sujet vient faire du train...
MOUTIER.--Qu'il y vienne donc pendant que j'y suis: moi et Capitaine,
nous lui ferons son affaire, et lestement, je vous reponds.
Mme Blidot sourit, alluma une chandelle et la porta dans la chambre
preparee pour Moutier. Il la remercia, la salua, ferma sa porte, alluma
un cigare, fuma quelque temps, tout en reflechissant, fit un grand signe
de croix, une courte priere, se coucha et s'endormit jusqu'au lendemain
matin. Il parait qu'il dormit longtemps, car, a son reveil, il entendit
le babi
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