i jusqu'aux batiments
qui servaient de commun. Tout etait sombre et silencieux; les portes
etaient fermees. Pas moyen de penetrer dans l'interieur. Un hangar
ouvert leur permit d'approcher; ils y etaient depuis quelques instants,
cherchant un moyen d'arriver jusqu'a Torchonnet, lorsqu'une porte de
derriere s'ouvrit. Un homme en sortit sans bruit; Moutier reconnut
l'aubergiste, faiblement eclaire par la lanterne sourde qu'il tenait a
la main. Il se dirigea vers le charbonnier, separe du hangar par une
cloison en planches; il en ouvrit la porte avec precaution et entra.
"Voila ton souper que je t'apporte, dit-il d'une voix rude, mais basse.
L'etranger est parti; demain tu reprendras ton ouvrage, et si tu as
le malheur de raconter un mot de ce que tu as vu et entendu, de dire a
n'importe qui comme quoi tu as ete enferme ici pendant que l'etranger
etait a l'auberge, je te briserai les os et je te brulerai a petit
feu... Entends-tu ce que je dis, animal?"
--Oui, Monsieur, repondit la voix tremblante de Torchonnet.
L'aubergiste sortit, referma la porte et rentra dans la maison.
Quand Moutier fut bien assure qu'on ne pouvait pas l'entendre, il
s'approcha de la cloison et dit a Jacques d'appeler Torchonnet a voix
basse.
"Torchonnet, mon pauvre Torchonnet, dit Jacques, pourquoi es-tu enferme
dans ce trou noir?"
TORCHONNET.--C'est vous, mon bon Jacques? Comment avez-vous su que ce
mechant homme m'avait enferme? Je ne sais pas pourquoi il m'a mis ici.
JACQUES.--Depuis quand y es-tu?
TORCHONNET.--Depuis le jour ou est arrive un beau monsieur, dans une
belle voiture, avec une cassette pleine de choses d'or. Il a eu pitie de
moi; il a dit a mon maitre que j'avais l'air malade et malheureux. Il
lui a propose de donner de l'argent pour me placer ailleurs; mon maitre
a refuse. Alors, ce bon monsieur m'a donne une piece d'or en me disant
d'aller lui acheter pour un franc de tabac et de garder le reste pour
moi. Mon maitre m'a suivi, m'a arrache la piece d'or avant que j'eusse
seulement eu le temps de sortir dans la rue. J'ai voulu crier; il m'a
saisi par le cou, m'a entraine dans ce charbonnier et m'a jete dedans en
me disant que, si j'appelais, il me tuerait. Il m'apporte tous les soirs
un morceau de pain et une cruche d'eau.
MOUTIER.--Pauvre garcon!
La voix de Moutier fit tressaillir Torchonnet.
TORCHONNET.--Mon Dieu! mon Dieu! il y a quelqu'un avec vous, Jacques?
Mon maitre le saura; il dira que j'ai parle et i
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