ir de boire des santes avec un vin comme ca! On se
mit a table, on soupa de bon appetit; on causa un peu et on se coucha,
comme l'avait dit le general. Chacun dormit sans bouger jusqu'au
lendemain. Jacques et Paul mirent leurs montres sous leur oreiller; il
faut meme avouer que non seulement Elfy resta longtemps a contempler la
sienne, a l'ecouter marcher, mais qu'elle ne voulut pas non plus s'en
separer et qu'elle s'endormit en la tenant dans ses mains. Bien plus,
Mme Blidot et Moutier firent comme Jacques et Paul; et, a leur reveil,
leur premier mouvement fut de reprendre la montre et de voir si elle
marchait bien.
XII
Le juge d'instruction.
Quand tout le monde se reunit le lendemain pour le cafe, le general
examina avec satisfaction les visages radieux qui l'entouraient. Le
repas fut gai, mais court; chacun avait a ranger et a travailler.
Moutier se chargea de faire la chambre du general et la salle, pendant
que les deux soeurs, aidees de Jacques, nettoyaient la vaisselle de
la veille et preparaient tout pour la journee. Le general sortit; il
faisait beau et chaud. En allant et venant dans le village, il vit
arriver les gendarmes escortant une charrette ou se trouvaient Bournier,
etendu sur le dos a cause de sa blessure, son frere et sa femme, assis
sur une banquette. Une autre voiture, contenant le juge d'instruction
et l'officier de gendarmerie suivait la charrette. On s'arreta devant
l'auberge; on fit descendre le frere et la femme de Bournier; deux
gendarmes les emmenerent et les firent entrer dans la salle ou se
trouvaient deja les magistrats et l'officier. Deux autres gendarmes
apporterent l'aubergiste qui criait a chaque secousse qu'il recevait,
malgre les precautions et les soins dont on l'entourait. Ils
l'etendirent par terre sur un matelas; le juge d'instruction appela un
des gendarmes.
"Allez chercher les temoins et la victime.
Les gendarmes partirent pour executer les ordres.
Le general avait accompagne le cortege; il entra dans la salle presque
en meme temps que les criminels. Il se placa en face de Bournier qui le
regardait d'un oeil enflamme par la colere.
"Gredin! gueux, scelerat!--cria le general.
-Qui est cet homme qui injurie le prevenu? dit le juge d'instruction en
se retournant vers lui. Pourquoi est-il entre? Faites-le sortir.
LE GENERAL.--Pardon, Monsieur, je suis entre parce que je dois rester.
Et si vous me faites sortir, vous serez fort attrape.
LE JUGE.--Parlez plus
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