aux eaux pour m'epargner le voyage a
pied par etapes, mais je lui avais raconte mon histoire, et je lui ai
dit que je voulais absolument revoir mes enfants... et aussi... mes
bonnes amies... Que diantre! je peux bien vous appeler mes bonnes amies,
puisque vous soignez ces enfants et que je n'ai personne au monde que
vous qui m'aimiez, et que je n'ai eu de bonheur que chez vous, aupres
de vous, et que, si ce n'etaient les convenances et la necessite de me
faire un avenir, je ne bougerais plus d'ici, et que je me ferais votre
serviteur, votre defenseur, tout ce que, vous voudriez.
MADAME BLIDOT, souriant.--Oh! moi d'abord, je ne vous defends pas de
nous traiter avec amitie, parce que nous vous aimons bien et que nous
sommes bien heureuses, de vous revoir! N'est-ce pas, Elfy?
ELFY.--C'est la verite, mon cher monsieur Moutier; nous avons bien
souvent parle de vous et desire votre Retour.
MOUTIER.--Merci, mes bonnes amies, merci. Mais il y a quelqu'un que
j'oublie, dans ma joie de me retrouver ici. Que devient le pauvre
Torchonnet?
JACQUES.--Toujours bien malheureux, bien miserable! Depuis trois jours
je ne l'ai pas vu; peut-etre est-ce parce qu'il a plus a faire. Il
est venu ces jours-ci un monsieur a l'auberge de Torchonnet, un beau
monsieur dans une belle voiture; il est reparti hier avec sa belle
voiture. Ce qui est drole, c'est que ce monsieur n'est pas sorti une
fois de l'auberge; probablement que Torchonnet a ete occupe avec lui
au-dedans.
MOUTIER:--Nous irons faire une reconnaissance de ce cote; mais il faudra
la faire habilement, a la tombee du jour, pour que l'ennemi ne nous
surprenne pas.
JACQUES.--L'aubergiste n'est pas revenu encore; il ne reste que sa
femme.
PAUL.--Et le bon Capitaine, qu'est-il devenu?
MOUTIER.--Capitaine est mort en brave, au siege de Sebastopol, la tete
emportee par un boulet, en montant une garde avec moi par vingt degres
de froid.
JACQUES:--Pauvre Capitaine! J'esperais bien le revoir.
VII
Un ami sauve.
L'apres-midi se passa en conversations et promenades; mais on evita
d'aller du cote de l'auberge Bournier. Ce ne fut qu'apres le souper,
quand il commenca a faire nuit, que Moutier, accompagne de Jacques,
se dirigea de ce cote pour tacher d'avoir des nouvelles du pauvre
Torchonnet. Ils firent un grand detour pour arriver par les derrieres de
l'auberge; .Moutier marchait, guide par Jacques, dans les sentiers et
les ruelles les plus desertes. Ils arriverent ains
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