c Jacques ouvrir la porte du
charbonnier; mais la clef n'y etait pas. Jacques voulait aller la
chercher dans les poches de l'aubergiste; "Pas la peine, mon ami; je me
passe de clef; tu vas voir comment."
Moutier donna un coup d'epaule a la porte: elle resista; il donna une
seconde secousse: un craquement se fit entendre et la porte tomba dans
le charbonnier. Torchonnet eut une peur epouvantable; il n'osait
pas sortir du coin ou il s'etait refugie. Jacques le rassura en lui
expliquant pourquoi Moutier avait brise la porte et comme quoi le
mechant Bournier allait etre mis en prison par les gendarmes,
qu'on attendait. Torchonnet ne pouvait croire a sa delivrance et a
l'arrestation de son mechant maitre. Dans sa joie, il se jeta aux
genoux de Moutier et de Jacques et voulut les leur baiser; Moutier l'en
empecha. "C'est le bon Dieu qu'il faut remercier, mon garcon, c'est lui
qui t'a sauve."
TORCHONNET.--Je croyais que c'etait vous, Monsieur, avec le bon Jacques.
MOUTIER.--Je ne dis pas non, mon ami, mais c'est tout de meme le bon
Dieu qu'il faut remercier. Tu ne comprends pas, je le vois bien, mais un
jour tu comprendras. Suis-nous, je vais te mener chez M. le cure.
TORCHONNET, joignant les mains.--Oh non! non, pas le cure! pas le cure!
grace, je vous en supplie!
MOUTIER.--Pourquoi cette peur de M. le cure? Que t'a-t-il fait?
TORCHONNET.--Il ne m'a rien fait, parce que je ne l'ai jamais approche;
mais s'il me touchait, il me mangerait tout vivant.
MOUTIER.--En voila une bonne betise! Qui est-ce qui t'a conte ces
sornettes?
TORCHONNET.--C'est mon maitre, qui m'a bien defendu de l'approcher pour
ne pas etre devore.
JACQUES.--Ha! ha! ha! Et moi qui y vais tous les jours, suis-je devore?
TORCHONNET.--Vous? vous osez?... Comment que ca se fait donc?
MOUTIER.--Ca se fait que ton maitre est un mauvais gueux, un gredin, qui
avait peur que le cure ne vint a ton secours, et qui t'a fait croire
que, si tu lui parlais, il te mangerait. Voyons, mon pauvre garcon, pas
de ces sottises, et suis-moi.
Torchonnet suivit Moutier et Jacques avec repugnance. Moutier traversa
l'auberge, lui fit voir son maitre garrotte ainsi que sa femme et le
frere, puis il sortit et alla au presbytere.
La porte etait fermee parce qu'il se faisait un peu tard. Moutier
frappa. Le cure vint ouvrir lui-meme. Il reconnut Moutier.
LE CURE:--Bien le bonjour, mon bon monsieur Moutier; vous voila de
retour? depuis quand?
MOUTIER.--Depuis
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