IER.--Pardon, ma chere, mon excellente amie, de m'etre empare d'Elfy
sans attendre votre consentement. C'est le general qui a brusque la
chose!
MADAME BLIDOT.--J'esperais ce denouement pour le bonheur d'Elfy. Des
votre premier sejour j'ai bien vu que vous vous conveniez tous les deux;
votre seconde, votre troisieme visite et vos lettres ont entretenu mon
idee; vous y parliez toujours d'Elfy; quand vous etes revenu, les choses
se sont prononcees, et l'equipee d'Elfy, lorsqu'elle vous a cru en
danger, disait clairement l'affection qu'elle a pour vous. Vous ne
pouviez pas vous y tromper.
MOUTIER.--Aussi ne m'y suis-je pas trompe, ma chere soeur, et c'est ce
qui m'a donne le courage d'expliquer comme quoi j'y pensais, mais que
j'etais arrete par mon manque de fortune; mon bon general y a largement
pourvu. Et me voici bientot votre heureux frere, dit-il en embrassant
encore Mme Blidot; et votre tres heureux mari et serviteur, ajouta-t-il
en se tournant vers Elfy.--Mon bon ami, mon bon ami, s'ecria Jacques a
son tour, je suis content, je suis heureux! Vous garderez votre belle
chambre et vous resterez toujours avec nous! Et ma tante Elfy ne sera
plus triste! Elle pleurait, ce matin, Je l'ai bien vue!
--Chut, chut, petit bavard! dit Elfy en l'embrassant, ne dis pas mes
secrets.
JACQUES.--Je peux bien les dire a mon ami, puisqu'il est aussi le votre.
LE GENERAL.--Ah ca! dejeunerons-nous enfin? Je meurs de faim, moi! Vous
oubliez tous que j'ai ete pendant deux jours au pain et a l'eau, et que
l'estomac me tiraille que je n'y tiens pas. Je n'ai pas une Elfy, moi,
pour me tenir lieu de dejeuner, et je demande mon cafe.
MADAME BLIDOT.--Le voici tout pret. Mettez-vous a table, general.
--Pardon, Elfy, c'est moi qui sers a partir d'aujourd'hui, dit Moutier en
enlevant le plateau des mains d'Elfy, vous m'en avez donne le droit.
--Faites comme vous voudrez, puisque vous etes le maitre, repondit Elfy
en riant.
--Le maitre-serviteur, reprit Moutier.
--Comme moi, general-prisonnier, dit le general avec un soupir.
MOUTIER.--Ce ne sera pas long, mon general; la paix se fait et vous
retournerez chez vous.
LE GENERAL.--Ma foi, mon ami, j'aimerais autant rester ici pendant Un
temps.
MOUTIER.--Vous assisterez a mon mariage, general.
LE GENERAL.--Je le crois bien, parbleu! C'est moi qui ferai les frais de
la noce. Et un fameux repas que je vous donnerai! Tout de chez Chevet.
Vous ne connaissez pas ca; mais moi, qui
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