nna sa benediction d'une voix emue.
LE CURE.--Soyez heureuse, mon enfant! Votre choix est bon; ce jeune
homme est pieux et sage; je l'ai juge ainsi la premiere fois qu'il est
venu chez moi pour prendre des renseignements sur vous, et surtout dans
les quelques jours qu'il a passes chez vous depuis.
MOUTIER.--Monsieur le cure, je vous remercie de votre bonne opinion, et
comme a l'avenir tout doit etre en commun entre Elfy et moi, je vous
demande de me donner un bout de la benediction qu'elle vient de
recevoir.
Moutier mit un genou en terre et recut, la tete inclinee, la benediction
qu'il avait demandee. Avant de se relever, il prit la main d'Elfy et dit
d'un accent penetre:
"Je jure devant Dieu et devant vous, monsieur le cure, de faire tous mes
efforts pour rendre heureuse et douce la vie de cette chere Elfy, et de
ne jamais oublier que c'est a Dieu que nous devons notre bonheur."
Moutier se releva, baisa tendrement la main d'Elfy; Mme Blidot pleurait,
Elfy sanglotait, le general s'agitait.
LE GENERAL.--Que diantre! je crois que je vais aussi tirer mon
mouchoir. Allez-vous bientot finir, vous autres? Moi qui amene M. le
cure pour lui faire voir comme vous etes tous heureux, et voila que
Moutier nous fait une scene a faire pleurer sa fiancee et sa soeur; moi,
j'ai une peine du diable a garder l'oeil sec. M. le cure a les yeux
rouges, et Moutier lui-meme ne doit pas avoir la voix bien assuree.
MOUTIER.--Mon general, les larmes que je retiens sont des larmes de
bonheur, les premieres que je verse de ma vie. C'est a vous que je
dois cette douce emotion! Vous etes d'aujourd'hui mon bienfaiteur!
ajouta-t-il en saisissant les deux mains du general en les serrant avec
force dans les siennes.
L'agitation du general augmentait. Enfin, il sauta au cou de Moutier,
serra dans ses bras le cure etonne, manqua le jeter par terre en le
lachant trop brusquement, et marcha a pas redoubles vers la porte de sa
chambre qu'il referma sur lui.
Le cure s'assit, Mme Blidot se mit pres de lui, Elfy s'assit pres de sa
soeur, et Moutier placa sa chaise pres d'Elfy.
La porte du general se rouvrit, il passa la tete et cria:
"A quand la noce?"
--Comment, la noce? dit Elfy; est-ce qu'on a eu le temps d'y penser?
LE GENERAL.--Mais moi qui pense a tout, je demande le jour pour
commander mon diner chez Chevet.
MOUTIER.--Halte-la! mon general, vous prenez trop tot le pas de charge.
Vous oubliez nos eaux de Bagnoles et vos bles
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