y manque, ma foi. Chambre soignee, on peut bien
dire."
ELFY.--C'est qu'elle vous est destinee. Nous n'y avons encore mis
personne, et nous l'appelons: chambre de notre ami Moutier. C'etait un
souvenir pour vous et de vous. Jacques va quelquefois balayer, essuyer
la-dedans, et il dit toujours avec un soupir: "Quand donc notre bon ami
Moutier y sera-t-il?"
Avant que Moutier eut le temps de remercier Elfy, Jacques et Paul se
precipiterent dans la salle et dans les bras de Moutier.
"Ah! vous voila enfin dans votre chambre, dit Jacques. Restez-y, mon
ami, mon bon ami. Restez: nous serions tous si heureux!"
MOUTIER.--Impossible, mon enfant! Je ne servirais qu'a gener votre maman
et votre tante.
JACQUES.--Gener! Ah! par exemple! Elles ont dit je ne sais combien de
fois que vous leur seriez bien utile, et que vous etes si bon et si
obligeant qu'elles seraient enchantees de vous avoir toujours.
MOUTIER.--Tres bien, mon ami, je te remercie des bonnes paroles que
tu me dis, et quand j'aurai fait un peu fortune, je serai aussi bien
heureux ici. Mais je ne suis qu'un pauvre soldat sans le sou et je ne
peux pas rester ou je ne puis pas gagner ma vie.
Moutier embrassa encore Jacques et sortit de la jolie chambre pour
rentrer dans celle du general. Elfy s'occupa du dejeuner: elle cassa du
sucre, passa le cafe et alla chercher du lait a la ferme. Le general
etait eveille, et, sauf quelques legeres douleurs a son nez et a ses
yeux poches, il se sentait tres bien et ne demandait qu'a manger.
"Trois jours au pain et a l'eau, dit-il, m'ont diablement mis en
appetit, et, si vous pouviez m'avoir une tasse de cafe au lait, vous me
feriez un sensible plaisir."
MOUTIER.--Tout de suite, mon general; on va vous en apporter avant dix
minutes.
Moutier rentra dans la salle au moment ou Elfy rentrait avec une jatte
de lait. Elfy avait l'air triste et ne disait rien. Moutier lui demanda
du cafe pour le general; elle le mit au feu sans repondre.
MOUTIER.--Elfy, qu'avez-vous? Pourquoi etes-vous triste?
ELFY.--Parce que je vois que vous ne tenez pas a nous et que vous ne
vous inquietez pas de nous voir du chagrin, a Jacques et a moi.
MOUTIER.--J'avoue que le chagrin de Jacques, qui est ici heureux comme
un roi, ne m'inquiete guere; mais le votre, Elfy, me va au fond du
coeur. Je vous jure que, si j'avais de quoi vivre sans vous etre a
charge, je serais le plus heureux des hommes, parce que je pourrais
alors esperer ne jamais v
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