n'y avait aucune blessure grave et si
le sang dont il avait le visage inonde provenait d'une blessure ou d'un
fort saignement de nez. A la voix d'Elfy, il se releva, et, allant a
elle:
"Ma bonne, ma chere Elfy, je suis desole de vous voir ici; n'y restez
pas, je vous prie. Envoyez-moi du monde. Pourquoi etes-vous venue?"
ELFY.--J'avais entendu le coup de pistolet et votre voix: je craignais
qu'il ne vous fut arrive malheur, et je suis accourue. Ils sont la dans
la salle une douzaine d'hommes, mais ils n'osent pas entrer; alors je
suis venue.
--Sans avoir egard au danger! Je n'oublierai pas cela, Elfy! dit Moutier
lui serrant affectueusement les mains. Non jamais!... Mais, puisque
vous voila, appelez-moi du monde; il faut soigner ces gueux-la, aller
chercher les gendarmes et tirer ce pauvre monsieur qu'ils ont voulu tuer
pour le voler sans doute. J'avais renvoye Jacques pres de vous avant
d'entrer.
Elfy, sans faire de questions, retourna a la salle, dit brievement
aux hommes ce que Moutier leur demandait, et retourna en toute hate a
l'Ange-Gardien pour rassurer sa soeur qui etait restee avec Paul. Elfy
rencontra a la porte de l'auberge de Bournier le petit Jacques qui
accourait aussi tout effraye; il avait entendu le coup de pistolet, et
il se depechait d'arriver au secours de son ami. Il avait ete retarde
par le chemin plus long qu'il avait du prendre pour revenir au village.
Elfy lui expliqua en peu de mots ce qui venait d'arriver, et le ramena
avec elle, pensant qu'il generait Moutier plus qu'il ne lui servirait.
Les hommes qu'Elfy avait trouves tremblants dans la salle de l'auberge
deployerent un courage heroique aussitot qu'ils eurent appris par Elfy
ou en etaient les choses et le genre de secours que leur demandait
Moutier. Ils se lancerent bruyamment dans la chambre ou gisaient les
blesses, et s'empresserent d'offrir au vainqueur l'aide de leurs bras
pour terrasser ses ennemis.
MOUTIER.--Quant a cela, Messieurs, je ne vous ai pas laisse d'ouvrage,
les voila tous par terre; mais il faut que vous m'aidiez a les loger,
aux frais de l'Etat, dans la prison de la ville la plus proche. Je ne
suis ici qu'en passant; je n'y connais personne. Et puis vous voudrez
bien, quelques-uns de vous, m'aider a transporter le pauvre etranger
qu'ils ont voulu egorger et qui n'a pas encore repris connaissance; pour
celui-la, c'est un medecin qu'il faut et de bons soins.
Les vaillants habitants se mirent a la disposition
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