ils entraient
dans le fort." Comme la saison etait avancee, d'Iberville decida de
rester jusqu'au printemps.
En attendant, le Pere Marest, tout en prenant soin de la garnison,
s'occupa des sauvages. Il les plaignait, et gemissait en voyant leur
ignorance de la verite et leur entrainement au mal. Il les accueillait
au fort avec toute bonte, et il allait au plus loin les rejoindre. A
force d'etudier, il en vint bientot a comprendre plusieurs dialectes
indiens. "Il est impossible, nous dit M. Bacqueville de La Potherie,
d'enumerer les actes de zele et de devouement du pere. Il allait
au loin, marchant jour et nuit, se contentant de la nourriture des
sauvages; rien ne pouvait le rebuter."
En meme temps, dans ses excursions, il prenait connaissance du pays et
de ses ressources. Il nous dit qu'a l'automne et au printemps, on voit
des multitudes prodigieuses d'oies et d'outardes, de perdrix et de
canards. Il y a des jours ou les caribous passent par centaines et par
milliers, suivant le temoignage de M. de Serigny, qui allait souvent a
la chasse.
M. d'Iberville, apres avoir hiverne au fort, laissa son frere de
Maricourt commandant de la place, avec le sieur de La Foret pour
lieutenant, et il revint en France avec deux navires charges de
pelleteries. Il arriva a la Rochelle le 9 octobre 1697, et il se mit
aussitot en devoir de preparer une nouvelle expedition. On pense que
c'est dans cet intervalle que le chevalier d'Iberville vint a Versailles
pour exposer ses vues au ministre du roi, M. de Pontchartrain.
CHAPITRE VII
M. D'IBERVILLE A VERSAILLES.
C'etait vers 1696, et lorsque le regne de Louis XIV etait dans son plus
grand eclat. On venait de construire, sous l'impulsion de Colbert, des
monuments qui avaient fait de Paris la premiere ville du monde. On avait
bati les Invalides, termine le Val-de-Grace, les Tuileries, le Louvre,
ouvert et plante les grands boulevards depuis la porte Saint-Honore
jusqu'a la Bastille, avec ces belles portes Saint-Antoine, Saint-Martin,
Saint-Denis, qui font un si grand effet. Dans le meme temps, Versailles
etait devenu une merveille de grandeur et de richesse.
Au milieu de ces progres, le roi se trouvait environne des plus grandes
illustrations. Il presidait une noblesse devouee et brillante. Il avait
des ministres habiles, des generaux redoutables, des genies merveilleux
dans tous les genres. Les finances, par les soins de Colbert, avaient
double d'importance; l'armee avait
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