ux Chats, nom qui a
subsiste jusqu'a present.
Il fallait tenir la mer a une certaine distance parce que le vent etait
violent et pouvait pousser sur les rochers; mais en meme temps il ne
fallait pas s'eloigner beaucoup, pour n'etre pas enleve par la mer, qui
etait tres forte.
"C'est un metier bien gaillard, dit M. d'Iberville, que de decouvrir les
cotes de la mer avec des chaloupes qui ne sont ni assez grandes pour
tenir la mer quand elles sont sous voiles, ni meme quand elles sont a
l'ancre, et qui sont trop grandes pour aborder a une cote plate, ou
elles touchent et echouent a une demi-lieue au large."
C'est alors qu'etant oblige de gagner la cote, l'equipage, vers le soir
du 2 mars, apercut des rochers tres rapproches les uns des autres et a
travers lesquels passait un grand courant.
C'etait une riviere, et d'Iberville pressentit que c'etait celle qu'il
cherchait.
Il s'approcha avec precaution, parce que le courant etait rapide a faire
une lieue et demie a l'heure. M. d'Iberville reconnut alors plusieurs
circonstances qui s'accordaient avec les informations de M. de La Salle.
Les eaux conservaient leur douceur a une grande distance dans la mer,
comme l'avait dit M. de La Salle. Les roches etaient tres nombreuses,
tres rapprochees et l'on voyait qu'elles etaient de bois petrifie avec
la vase; elles resistaient a la mer et elles etaient toutes noires;
parfois elles etaient espacees de vingt pas et d'autres fois beaucoup
plus; mais elles conservaient l'aspect d'une palissade, comme l'avaient
affirme les Espagnols. Le fleuve avait 400 toises de largeur, avec une
rapidite extraordinaire.
D'Iberville reconnut que c'etait le Mississipi, et qu'il contemplait
cette embouchure que M. de La Salle n'avait pu decouvrir.
La satisfaction etait grande chez tous ceux qui prenaient part a
l'expedition. Les gens d'Iberville, qui lui etaient si devoues, etaient
heureux de voir leur chef bien-aime couronne encore de succes dans une
entreprise tentee vainement jusqu'a lui. M. d'Iberville remerciait la
divine Providence; il voyait se realiser toutes ses esperances. Il se
trouvait comme en possession d'un nouveau monde qu'il avait promis
au roi et a M. de Pontchartrain; enfin, le titre de gouverneur de la
Louisiane lui etait desormais acquis. Le Pere Douay considerait surtout
les interets spirituels de ce grand continent.
Le lendemain, 3 mars, l'equipage aborda a l'entree du fleuve; au matin,
la sainte, messe fut dite en
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