faucon que les revolutions avaient ruine. Ma collection, en
peu de temps, s'enrichit de l'ours, du cameleon et de plusieurs lapins
sortis de l'enregistrement ou des contributions. Mais le pays manquait
alors de muses departementales dignes d'etre cataloguees parmi les
merlettes. On m'assure qu'elles foisonnent aujourd'hui.
Grand-pere, a qui je fis part de mes observations, m'approuva
entierement:
--Tu sais maintenant, m'assura-t-il, que les animaux et les hommes
sont freres. Mais les animaux valent mieux que nous.
Cependant un secret instinct m'avertissait de ne pas consulter mes
parents a ce sujet.
II
LE DESIR
Les beaux jours etaient revenus. Trois mois nous separaient encore des
vacances. Mon pere, d'accord avec le petit collegue craintif qu'il
avait a nouveau consulte pour appuyer son propre avis, declara que je
ne retournerais pas au college avant la rentree d'octobre:
--Cet enfant a besoin de grand air. Il faut, avant tout, lui refaire
une sante.
Je fus peine de cette decision qui m'atteignait dans mon amour-propre.
Mis en conge pendant tout le dernier trimestre, je ne pouvais plus
songer a obtenir des couronnes a la distribution des prix. Or,
l'emulation me stimulait, et la premiere place m'etait agreable, de
quoi grand-pere se moquait:
--Ces classements ne signifient rien. Premier ou dernier, c'est tout
pareil.
Le programme de vie que mon pere me tracait etait bien simple: des
promenades matin et soir, loin des microbes de la ville, dans la
campagne ou l'on respire un vent frais que les poitrines humaines
n'ont pas contamine. Ainsi je reprendrais des forces et de l'appetit.
Mais qui m'accompagnerait et me conduirait? Qui assumerait ce
preceptorat ambulant? Mon pere, deja retarde par ma longue maladie,
appartenait son absorbante profession. Ma mere, dont la presence etait
constamment requise par toute la famille, et surtout par les plus
petits, ne quittait guere la maison que pour l'eglise. Tante Dine
manquait de jambes au dehors, ce qui ne l'empechait pas de monter et
descendre les escaliers cent fois par jour, de la cuisine a la tour et
de la tour a la cuisine. Restait grand-pere. Il se promenait deja
matin et soir pour son propre compte que lui couterait-il de m'emmener
avec lui? Les choses s'arrangeaient a merveille, et cette solution
s'imposait. Je compris cependant qu'elle rencontrait de vives
resistances; car j'entendis de contrebande que mes parents la
discutaient, sur ce
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