jour elle commenca a crier dessous terre, a la
voix de laquelle s'assemblerent une grande multitude de gens et appelerent
les parens et mary de la defuncte, devant lesquels elle fut tiree vive du
sepulchre et ressuscitee. Et voulant son mary la conduire a sa maison, ne
vouloit, mais a grande instance demandoit estre amenee a l'eglise des
chrestiens, ce que le mary et parens ne vouloient: mais elle persistait a
prier qu'on la y menast, car vouloit estre baptisee et estre chrestienne.
Les parens indignez la menerent a la grande ville de Damas, et la livreront
ez mains de la justice, a fin que comme heretique elle fut punie. Le bruit
en courut par tout le pays. Dont s'assembla en Damas une infinite de peuple
pour ceste chose nouvelle. Elle fut presentee a celuy qui est juge des
choses appartenans a la religion, le cadi, a laquelle dit le juge: O
insensee! veux-tu suivre la foy damnee des chrestiens pour estre condamnee
a damnation eternelle en enfer? Auquel respondit, disant: Je veux estre
chrestienne pour evader les peines que tu dis, a cause que nul n'est sauve
que les chrestiens: a laquelle respondit le cadi: Et quelle certitude as-tu
de cecy? Elle respond que tous ceux laquelle avoit cogneu en leur vie qui
estoient trespassez, les avoit tous veus en enfer. Alors crierent tous ceux
qui estoient la presens: Adonc nous sommes tous damnez? elle respond
qu'ouy; ce que entendant, le peuple avec grande fureur la voulurent
lapider, les autres crioient que comme infidelle fut bruslee. Le cadi dit
qu'il n'en estoit pas d'avis, afin que les chrestiens ne s'en glorifiassent
au grand mespris d'eux et de leur foy, mais pour nostre gloire traittons la
comme folle et insensee et la renvoyons pour telle, par instrument public.
Ce que fut fait; a l'heure ceste bonne femme s'en vint a l'eglise des
chretiens, et receut la foy et le baptesme: et depuis vesquit avec les
chrestiens en la religion chrestienne, et en icelle mourut."
[Note 1: _Oeuvres morales et diversifiees_, p. 376.]
"Certain Italien, dit Alexandre d'Alexandrie[1], ayant fait enterrer
honnestement un sien ami trespasse, et comme il revenoit a Rome, la nuict
l'ayant surpris, il fut contraint s'arrester en une hostellerie, sur le
chemin, ou, bien las de corps et afflige d'esprit, il se met en la couche
pour reposer. Estant seul et bien esveille, il lui fut avis que son ami
mort, tout pasle et descharne, lui aparoissoit tel qu'en sa derniere
maladie, et s'aprochoit de lui,
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