usement considere diverses contrees de Turquie et
d'Egypte, me fit un ample recit de ceste apparition susmentionnee, il y a
plus de quinze ans, m'affermant en avoir este le spectateur Claude Rocard,
apoticaire a Cably en Champagne, et douze autres chrestiens, ayans pour
trucheman et conducteur un orfevre d'Otrante en la Pouille, nomme Alexandre
Maniotti, il me disoit d'avantage avoir (comme aussi firent les autres)
touche divers membres de ces ressuscitans. Et comme il vouloit se saisir
d'une teste chevelue d'enfant, un homme du Caire s'escria tout haut: _Kali,
kali, ante matarafde_: c'est-a-dire, Laisse, laisse, tu ne scais que c'est
de cela. Or, d'autant que je ne pouvois bonnement me persuader qu'il fust
quelque chose de ce qu'il me contoit apporte de si loin, quoy qu'en divers
autres recits, conferez avec ce qui se lit en nos modernes, je l'eusse
toujours trouve simple et veritable, nous demeurasmes fort longtemps en
ceste opposition de mes oreilles a ses yeux, jusques a l'an 1591, que luy
ayant monstre les observations susmentionnees du docteur Camerarius: Or
cognoissez-vous (me dit-il) maintenant que je ne vous ay point conte des
fables. Depuis, nous en avons devise maintesfois, avec esbahissement et
reverence de la sagesse divine. Il me disoit la dessus qu'un chrestien
habitant en Egypte, lui a raconte par diverses fois, sur le discours de
ceste apparition ou resurrection, qu'il avoit aprins de son ayeul et pere,
que leurs ancestres recitoyent, l'ayant receu de longue main, qu'il y a
quelques centaines d'annees, que plusieurs chrestiens, hommes, femmes,
enfans, s'estans assemblez en ceste montagne, pour y faire quelque exercice
de leur religion, ils furent ceints et environnez de leurs ennemis en tres
grand nombre (la montagnette n'ayant gueres de circuit) lesquels taillerent
tout en pieces, couvrirent de terre ces corps, puis se retirerent au Caire;
que depuis, ceste resurrection s'est demonstree l'espace de quelques jours
devant et apres celui du massacre. Voila le sommaire du discours d'Estienne
du Plais, par lui confirme et renouvelle a la fin d'avril 1600, que je
descrivois ceste histoire, a laquelle ne peut prejudicier ce que recite
Martin de Baumgarten en son voyage d'Egypte, faict l'an 1507, publie par
ses successeurs, et imprime a Nuremberg l'an 1594. Car au XVIIIe chap. du
Ier liv. il dit que ces apparitions se font en une mosquee de Turcs pres du
Caire. Il y a faute en l'exemplaire: et faut dire Colline ou
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