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peut eschapper, ains fut noye. Cela avint sur le soir. Le mesme jour, un
peu apres disne, comme Camerarius sommeilloit, avis lui fut qu'il entroit
une barque de pescheur et qu'il tomboit en l'eau. Sur ce arriva vers lui,
Philippe Melanchthon son familier ami, auquel il fit en riant le conte de
ce sien songe, tenant sa vision pour chose vaine... Melanchthon et
Camerarius devisans ensemble de ce songe et triste accident, se
ramentierent l'un a l'autre ce qui leur estoit advenu et a Nesenus peu de
jours auparavant. Ils faisoyent eux trois quelque voyage en Hesse, et ayans
couche en une petite ville nommee Trese, le matin passerent un ruisseau
proche de la, pour y abreuver leurs chevaux. Comme ils estoyent en l'eau,
Nesenus decouvre en un costeau proche de la trois corbeaux croquetans,
battans des aisles et sautelans. Sur ce il demande a Melanchthon que lui
sembloit de cela? Melanchthon respondit promptement: Cela signifie que l'un
de nous trois mourra bien tost. Camerarius confesse que ceste response le
poignit jusques au coeur, et le troubla grandement; mais Nesenus ne fit
qu'en secouer la teste, et poursuivit son chemin alaigrement. Camerarius
adjouste qu'il fut en termes de demander a Melanchthon la raison de cette
sienne conjecture; et que tost apres Melanchthon lui dit que, se sentant
foible et valetudinaire, il ne pouvoit estimer que sa vie deut estre gueres
plus longue. Et je ne ramentoy point ces choses, dit-il, comme si
j'attribuois quelque efficace au vol et mouvement des oiseaux, ni ne fay
point de science des conjectures qu'on voudroit bastir la dessus: comme
aussi je scay que Melanchthon ne s'en est jamais soucie. Mais j'ai bien
voulu faire ce recit pour monstrer que parfois on void avenir des choses
merveilleuses dont il ne faut pas se mocquer, et qui apres l'evenement
suggerent diverses pensees a ceux qui les voyent ou en entendent parler."
[Note 1: _Vie de Ph. Melanchthon_.]
[Note 2: _Indices chronologiques_, an 1524.]
[Note 3: _Thresor des histoires admirables_, t. I, p. 373.]
Au recit de Zuinger[1], "La peste estant fort aspre es environs du Rhin
l'an 1364, plusieurs mourans a Basle avoyent ceste coustume par presage
merveilleux au fort de la maladie, et quelques heures devant que rendre
l'ame, d'appeller par nom et surnom quelqu'un de leurs parens, allies,
voisin ou amis. Ce nomme tomboit tost apres malade, et faisoit le mesme,
ainsi cest appel continuoit du troisiesme au quatriesm
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