me, si un caporal de notre compagnie n'avoit fait
cesser la maladie, en executant le remede que les gens du pays emploient
pour cela. Il est des plus particuliers, et quoiqu'infaillible, je ne l'ai
jamais lu dans aucun rituel. Le voici: "On choisit un jeune garcon qui est
d'age a n'avoir jamais fait oeuvre de son corps, c'est-a-dire, qu'on croit
vierge. On le fait monter a poil sur un cheval entier qui n'a jamais
sailli, et absolument noir; on le fait promener dans le cimetiere, et
passer sur toutes les fosses: celle ou l'animal refuse de passer malgre
force coups de corvache qu'on lui delivre, est reputee remplie d'un
vampire; on ouvre cette fosse, et l'on y trouve un cadavre aussi gras et
aussi beau que si c'etoit un homme heureusement et tranquillement endormi:
on coupe le col a ce cadavre d'un coup de beche, dont il sort un sang des
plus beaux et des plus vermeils et en quantite. On jureroit que c'est un
homme des plus sains et des plus vivans qu'on egorge. Cela fait, on comble
la fosse, et on peut compter que la maladie cesse, et que tous ceux qui en
etoient attaques, recouvrent leurs forces petit a petit, comme gens qui
echappent d'une longue maladie, et qui ont ete extenues de longuemain.
C'est ce qui arriva a nos cavaliers qui en etoient attaques. J'etois pour
lors commandant de la compagnie, et mon capitaine et mon lieutenant etant
absens, je fus tres-pique que ce caporal eut fait faire cette experience
sans moi."
Dom Calmet[1] rapporte encore deux faits de vampirisme en Pologne:
[Note 1: Meme ouvrage, t. II, p. 72-73.]
"A Warsovie, un pretre ayant commande a un sellier de lui faire une bride
pour son cheval, mourut auparavant que la bride fut faite; et comme il
etoit de ceux que l'on nomme vampires en Pologne, il sortit de son tombeau
habille comme on a coutume d'inhumer les ecclesiastiques, prit son cheval a
l'ecurie, monta dessus, et fut a la vue de tout Warsovie a la boutique du
sellier, ou d'abord il ne trouva que la femme qui fut fort effrayee, et
appela son mari, qui vint; et ce pretre lui ayant demande sa bride, il lui
repondit: Mais vous etes mort, M. le cure; a quoi il repondit: Je te vas
faire voir que non, et en meme tems le frappa de telle sorte que le pauvre
sellier mourut quelques jours apres et le pretre retourna en son tombeau."
"L'intendant du comte Simon Labienski, Staroste de Posnanie, etant mort, la
comtesse douairiere de Labienski voulut, par reconnaissance de ses
services, qu'il
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