lle partie ni de chair, ni d'os;
ensuite on lui perca le coeur avec une espece de lance de fer rond et
pointu; il en sortit une matiere blanchatre et fluide avec du sang, mais le
sang dominant sur la matiere, le tout n'ayant aucune mauvaise odeur;
ensuite de quoi on lui trancha la tete avec une hache semblable a celle
dont on se sert en Angleterre pour les executions: il en sortit aussi une
matiere et du sang semblable a celle que je viens de depeindre, mais plus
abondamment a proportion de ce qui sortit du coeur.
"Au surplus, on le rejetta dans la fosse, avec force chaux vive pour le
consommer plus promptement; et des-lors sa niece, qui avoit ete sucee deux
fois, se porta mieux. A l'endroit ou ces personnes sont sucees, il se forme
une tache tres bleuatre; l'endroit du moment n'est pas determine, tantot
c'est en un endroit, tantot c'est en un autre. C'est un fait notoire
atteste par les actes les plus autentiques, et passe a la vue de plus de
1,300 personnes toutes dignes de foi."
Le meme abbe donne cette autre lettre sur le meme sujet[1]:
[Note 1: Meme ouvrage, t. II, p. 68.]
"Vous souhaitez, mon cher cousin, etre informe au juste de ce qui se passe
en Hongrie au sujet de certains revenants, qui donnent la mort a bien des
gens en ce pays-la. Je puis vous en parler savamment: car j'ai ete
plusieurs annees dans ces quartiers-la, et je suis naturellement curieux.
J'ai oui en ma vie raconter une infinite d'histoires ou pretendues telles,
sur les esprits et sortileges; mais de mille a peine ai-je ajoute foi a une
seule: on ne peut etre trop circonspect sur cet article sans courir risque
d'en etre la dupe. Cependant il y a certains faits si averes, qu'on ne peut
se dispenser de les croire. Quant aux revenants de Hongrie, voici comme la
chose s'y passe. Une personne se trouve attaquee de langueur, perd
l'appetit, maigrit a vue d'oeil, et au bout de huit ou dix jours,
quelquefois quinze, meurt sans fievre ni aucun autre symptome, que la
maigreur et le dessechement.
"On dit en ce pays-la que c'est un revenant qui s'attache a elle et lui
suce le sang. De ceux qui sont attaques de cette maladie, la plupart
croyent voir un spectre blanc, qui les suit partout comme l'ombre fait le
corps. Lorsque nous etions en quartier chez les Valaques, dans le Bannat de
Temeswar, deux cavaliers de la compagnie dont j'etois cornette moururent de
cette maladie, et plusieurs autres qui en etoient encore attaques en
seroient morts de me
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