qui levant la teste pour le regarder et
transi de peur, l'interrogue, qu'il estoit? Le mort ne respondant rien se
despouille, se met au lict, et commence a s'approcher du vivant, ce lui
sembloit. L'autre ne scachant de quel coste se tourner, se met sur le fin
bord, et comme le defunct aprochoit tousiours, il le repousse. Se voyant
ainsi rebute, ce fut a regarder de travers le vivant, puis se vestir, se
lever du lict, chausser ses souliers et sortir de la chambre sans plus
aparoir. Le vivant eut telles affres de ceste caresse, que peu s'en falut
aussi qu'il ne passast le pas. Il recitoit que quand ce mort aprocha de lui
dans le lict, il toucha l'un de ses pieds, qu'il trouva si froid que nulle
glace n'est froide a comparaison."
[Note 1: Au IIe livre de ses _Jours geniaux_, ch. IX, cite par
Goulart, _Thresor d'histoires admirables_, t. I, p. 533.]
Goulart[1] rapporte, d'apres divers auteurs resumes par Camerarius[2], les
apparitions des morts dans certains cimetieres: "Un personnage digne de
foy, dit-il, qui avoit voyage en divers endroits de l'Asie et de l'Egypte,
tesmoignoit a plusieurs avoir veu plus d'une fois en certain lieu, proche
du Caire (ou grand nombre de peuple se trouve, a certain jour du mois de
mars, pour estre spectateur de la resurrection de la chair, ce disent-ils),
des corps des trespassez, se monstrans, et se poussans comme peu a peu hors
de terre: non point qu'on les voye tout entiers, mais tantost les mains,
parfois les pieds, quelquesfois la moitie du corps: quoi faict ils se
recachent de mesme peu a peu dedans terre. Plusieurs ne pouvans croire
telles merveilles, de ma part desirant en scavoir de plus pres ce qui en
est, je me suis enquis d'un mien allie et singulier ami, gentilhomme autant
accompli en toutes vertus qu'il est possible d'en trouver, esleve en grands
honneurs, et qui n'ignore presque rien. Iceluy ayant voyage en pays
susnommez, avec un autre gentil-homme aussi de mes plus familiers et grands
amis, nomme le seigneur Alexandre de Schullembourg, m'a dit avoir entendu
de plusieurs que ceste apparition estoit chose tres-vraye, et qu'au Caire
et autres lieux d'Egypte on ne la revoquoit nullement en doute. Pour m'en
asseurer d'avantage, il me monstra un livre italien, imprime a Venise,
contenant diverses descriptions des voyages faits par les Ambassadeurs de
Venise en plusieurs endroits de l'Asie et de l'Afrique: entre lesquels s'en
lit un intitule _Viaggio di Messer Aluigi, di Gi
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