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suyvoit; ny oncques puis ne l'abandonna en quelque lieu qu'elle fust. Je
vous diray grand merveille de ceste bonne ame. Je luy demanday en la
conjurant ou nom de Dieu assavoir si incontinent qu'elle fut partie de son
corps elle suyvit ceste jeune religieuse. L'ame respondit que ouy
veritablement ny jamais ne l'abandonneroit que ne vollast au ciel pour
jouyr de la vision eternelle entierement. Ce scay bien veritablement car ce
luy ay je demande depuys et l'ay ouy maintes fois. Et moult estoit
famyliere de moy. Et par elle ont este sceuz de grans cas qui ne pourroient
estre congneuz de mortelle creature dont je me suys donne grand admiration
et merveilles. Les secretz de Dieu sont inscrutables et aux ignorants
incredibles. Mais ceulx qui ont ouy et veu telles choses certes l'en les
doit croire plus entierement."
II.--REVENANTS, SPECTRES, LARVES.
Goulart[1] rappelle cette histoire d'apres Job Fincel[2]: "Un riche homme
de Halberstad, ville renommee en Allemagne, tenoit d'ordinaire fort bonne
table, se donnant en ce monde tous les plaisirs qu'il pouvoit imaginer, si
peu soigneux de son salut, qu'un jour il osa vomir ce blaspheme entre ses
escornifleurs, que s'il pouvoit tousiours passer ainsi le temps en delices,
il ne desireroit point d'autre vie. Mais au bout de quelques jours et outre
sa pensee, il fut contraint mourir. Apres sa mort on voyoit tous les jours
en sa maison superbement bastie, des fantosmes survenant au soir, tellement
que les domestiques furent contraints cercher demeure ailleurs. Ce riche
aparoissoit entre autres, avec une troupe de banquetteurs en une sale qui
ne servoit de son vivant qu'a faire festins. Il estoit entoure de
serviteurs qui tenoyent des flambeaux en leurs mains, et servoyent sur
table couverte de coupes et gobelets d'argent dore, portans force plats,
puis desservans: outre plus on oyoit le son des flustes, luths, espinettes
et autres instrumens de musique, bref, toute la magnificence mondaine dont
ce riche avoit eu son passetemps en sa vie. Dieu permit que Satan
representast aux yeux de plusieurs de telles illusions, afin d'arracher
l'impiete du coeur des Epicuriens."
[Note 1: _Thresor des histoires admirables_, t. I, p. 539.]
[Note 2: Au IIe livre des _Merveilles de notre temps_.]
Des Caurres[1] raconte "comment l'an 1555 en une bourgade, pres de Damas en
Syrie, nommee Mellula, mourut une femme villageoise, qui demeura six jours
au sepulchre; le septiesme
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