'un esprit, dont je ne doute
non plus que si j'en avois ete temoin, dit celui qui me l'a ecrite. Le
comte Despilliers le pere, etant jeune, et capitaine des cuirassiers, se
trouva en quartier d'hiver en Flandre. Un de ses cavaliers vint un jour le
prier de le changer d'hote, disant que toutes les nuits il revenoit dans sa
chambre un esprit qui ne le laissoit pas dormir. Le comte Despilliers
renvoya son cavalier, et se mocqua de sa simplicite. Quelques jours apres
le meme cavalier vint lui faire la meme priere; et le capitaine pour toute
reponse voulut lui decharger une volee de coups de baton, qu'il n'evita que
par une prompte fuite. Enfin il revint une troisieme fois a la charge, et
protesta a son capitaine qu'il ne pouvoit plus resister, et qu'il seroit
oblige de deserter si on ne le changeoit de logis. Despilliers qui
connoissoit le cavalier pour brave soldat et fort raisonnabe lui dit en
jurant: Je veux aller cette nuit coucher avec toi et voir ce qui en est.
Sur les dix heures du soir, le capitaine se rend au logis de son cavalier,
et ayant mis ses pistolets en bon etat sur la table, se couche tout vetu,
son epee a cote de lui, pres de son soldat, dans un lit sans rideaux. Vers
minuit, il entend quelque chose qui entre dans la chambre et qui en un
instant met le lit sans dessus dessous et enferme le capitaine et le soldat
sous le matelas et la paillasse. Despilliers eut toutes les peines du monde
a se degager, et a retrouver son epee et ses pistolets, et s'en retourna
chez lui fort confus. Le cavalier fut change de logis des le lenmain, et
dormit tranquillement chez un nouvel hote. M. Despilliers racontoit cette
aventure a qui vouloit l'entendre; c'etoit un homme intrepide et qui
n'avoit jamais scu ce que c'etoit que de reculer. Il est mort marechal de
camp des armees de l'empereur Charles VI et gouverneur de la forteresse de
Segedin. M. son fils m'a confirme depuis peu la meme aventure comme l'ayant
apprise de son pere."
[Note 1: _Traite sur les apparitions des esprits_, t. I, p. 267.]
III.--GNOMES. ESPRITS DES MINES. GARDES DES TRESORS.
"George Agricola[1] qui a scavamment traite la matiere des mines, des
metaux, et de la maniere de les tirer des entrailles de la terre,
reconnoit, dit dom Calmet[2], deux ou trois sortes d'esprits qui
apparoissent dans les mines: les uns sont fort petits, et ressemblent a des
nains ou des pygmees; les autres sont comme des vieillards recourbes et
vetus comme des mi
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