ort, laissant
trois enfants qui sont orphelins, car leur mere est plus que morte pour
eux. Je les ai pris, je les eleve, et je viens passer quelques heures
avec eux le dimanche et le jeudi. Quand ils ne sont pas a l'ecole, je
les interroge et joue avec eux, et je leur prouve par un peu de
tendresse qu'ils ne sont pas seuls au monde. Nous voici devant leur
porte; monte avec moi. Ne resiste pas; je le veux; ce sera ta punition,
jaloux!
Ils monterent; il n'y avait personne dans l'escalier et toutes les
portes etaient fermees; en arrivant au palier du premier etage, il la
prit dans ses deux bras, et l'embrassant:
--Tu es un ange! dit-il.
Durant quelques secondes elle le regarda tendrement; puis tout a coup se
mettant a rire:
--Et toi, dit-elle, sais-tu ce que tu es?--de ses levres elle lui
effleura l'oreille,--une grande bebete.
C'etait au dernier etage qu'habitaient les enfants, dans un logement
simple, tres-simple, mais cependant convenable: pour les garder et les
soigner ils avaient avec eux une vieille paysanne, ce fut elle qui vint
ouvrir la porte.
Aussitot les trois enfants accoururent et se jeterent sur Cara, sans
faire attention a Leon qui se tenait un peu en arriere.
--Bonjour tante, bonjour tante, quel bonheur!
XI
Carbans n'etait pas le seul creancier de Cara: Leon ne fut pas longtemps
sans decouvrir cette facheuse verite.
Bien entendu, ce ne fut pas Cara qui le lui apprit: elle s'etait
explique une bonne fois avec lui a propos de ses affaires, et elle
n'etait pas femme a revenir sur ce qu'elle avait dit; elle ne voulait
pas qu'il y eut de questions d'argent entre eux, cela avait ete
nettement formule; elle lui avait seulement montre les valeurs dont se
composait son avoir; mais en agissant ainsi elle n'avait eu qu'un but,
se renseigner sur ces valeurs et, lui demander conseil; Leon, qui
n'etait pas lui-meme bien au courant des choses financieres, avait du
interroger quelques personnes competentes, et il avait eu le tres-vif
chagrin de venir dire a sa maitresse que ce qu'elle considerait comme
une fortune n'etait qu'un ensemble de titres deprecies et qui pour la
plupart meme n'etaient pas realisables.
Cara avait recu cette mauvaise nouvelle sans en etre trop vivement
affectee, et cela non pas parce qu'elle l'attendait (elle etait loin
d'avoir une pareille pensee), mais parce qu'elle savait par experience
que des valeurs declares mauvaises par des gens de Bourse peuvent
devenir, a
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