le des
cinq directeurs, qui fut designe pour membre sortant. Ce fut un grand
sujet de satisfaction pour tous les ennemis de ce directeur, et une
occasion nouvelle de le calomnier plus commodement. Cependant, comme il
avait ete elu au conseil des anciens, il saisit une occasion de repondre
a ses accusateurs, et le fit de la maniere la plus victorieuse.
Il fut commis, a la sortie de Rewbell, la seule infraction aux lois
rigoureuses de la probite, qu'on, put reprocher au directoire. Les cinq
premiers directeurs, nommes a l'epoque de l'institution du directoire,
avaient fait une convention entre eux, par laquelle ils devaient
prelever sur leurs appointemens, chacun dix mille francs, afin de les
donner au membre sortant. Le but de ce noble sacrifice etait de menager
aux membres du directoire la transition du pouvoir supreme a la vie
privee, surtout pour ceux qui etaient sans fortune. Il y avait meme
une raison de dignite a en agir ainsi, car il etait dangereux pour la
consideration du gouvernement, de rencontrer dans l'indigence l'homme
qu'on avait vu la veille au pouvoir supreme. Cette raison meme decida
les directeurs a pourvoir d'une maniere plus convenable au sort de
leurs collegues. Leurs appointemens etaient deja si modiques, qu'un
prelevement de dix mille francs parut deplace. Ils resolurent d'allouer
une somme de cent mille francs a chaque directeur sortant. C'etait cent
mille francs par an qu'il en devait couter a l'etat. On devait demander
cette somme au ministre des finances, qui pouvait la prendre sur l'un
des mille profits qu'il etait si facile de faire sur des budgets de
six ou huit cents millions. On decida de plus que chaque directeur
emporterait sa voiture et ses chevaux. Comme tous les ans le corps
legislatif allouait des frais de mobilier, cette depense devait etre
avouee, et des lors devenait legitime. Les directeurs deciderent de plus
que les economies faites sur les frais de mobilier seraient partagees
entre eux. Certes, c'etait la une bien legere atteinte a la fortune
publique, si c'en etait une; et tandis que des generaux, des compagnies,
faisaient des profits si enormes, cent mille francs par an, consacres
a donner des alimens a l'homme qui venait d'etre chef du gouvernement,
n'etaient pas un vol. Les raisons et la forme de la mesure l'excusaient
en quelque sorte. Larevelliere, auquel on en fit part, ne voulut jamais
y consentir. Il declara a ses collegues qu'il n'accepterait jamais sa
part. Rewbell
|