e rue de Jerusalem), dans
une maison du temps d'Henri IV, et eut a loisir sous les yeux le
spectacle de la vie bourgeoise et de la vie de palais. Il perdit sa mere
en bas age; la famille etait nombreuse et son pere tres-occupe; le jeune
enfant se trouva livre a lui-meme, loge dans une guerite au grenier. Sa
sante en souffrit, son talent d'observation dut y gagner; il remarquait
tout, maladif et taciturne; et comme il n'avait pas la tournure d'esprit
reveuse et que son jeune age n'etait pas environne de tendresse, il
s'accoutuma de bonne heure a voir les choses avec sens, severite et
brusquerie mordante. On le mit bientot au college, ou il achevait sa
quatrieme, lorsqu'il fut attaque de la pierre; il fallut le tailler, et
l'operation faite en apparence avec succes lui laissa cependant pour le
reste de sa vie une tres-grande incommodite. Au college, Boileau lisait,
outre les auteurs classiques, beaucoup de poemes modernes, de romans,
et, bien qu'il composat lui-meme, selon l'usage des rhetoriciens,
d'assez mauvaises tragedies, son gout et son talent pour les vers
etaient deja reconnus de ses maitres. En sortant de philosophie, il fut
mis au droit; son pere mort, il continua de demeurer chez son frere
Jerome qui avait herite de la charge de greffier, se fit recevoir
avocat, et bientot, las de la chicane, il s'essaya a la theologie sans
plus de gout ni de succes. Il n'y obtint qu'un benefice de 800 livres
qu'il resigna apres quelques annees de jouissance, au profit, dit-on, de
la demoiselle Marie Poncher de Bretouville qu'il avait aimee et qui se
faisait religieuse. A part cet attachement, qu'on a meme revoque en
doute, il ne semble pas que la jeunesse de Despreaux ait ete fort
passionnee, et lui-meme convient qu'il est _tres-peu voluptueux_. Ce
petit nombre de faits connus sur les vingt-quatre premieres annees de
sa vie nous menent jusqu'en 1660, epoque ou il debute dans le monde
litteraire par la publication de ses premieres satires.
Les circonstances exterieures etant donnees, l'etat politique et social
etant connu, on concoit quelle dut etre sur une nature comme celle
de Boileau l'influence de cette premiere education, de ces habitudes
domestiques et de tout cet interieur. Rien de tendre, rien de maternel
autour de cette enfance infirme et sterile; rien pour elle de bien
inspirant ni de bien sympathique dans toutes ces conversations de
chicane aupres du fauteuil du vieux greffier, rien qui touche, qui
enleve et fasse q
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