le, madame d'Hervart, s'attacha au poete, lui offrit
l'attrait de sa maison, et devint pour lui, a force de soins et de
prevenances, une autre La Sabliere. A la mort de cette dame, elle
recueillit le vieillard, et l'environna d'amitie jusqu'au dernier
moment. C'est chez elle que l'auteur de _Joconde_, touche enfin de
repentir, revetit le cilice qui ne le quitta plus. Les details de cette
penitence sont touchants; La Fontaine la consacra publiquement par une
traduction du _Dies irae_, qu'il lut a l'Academie, et il avait forme
le dessein de paraphraser les Psaumes avant de mourir. Mais, a part le
refroidissement de la maladie et de l'age, on peut douter que cette
tache, tant de fois essayee par des poetes repentants, eut ete possible
a La Fontaine ou meme a tout autre d'alors. A cette epoque de croyances
regnantes et traditionnelles, c'etaient les sens d'ordinaire, et non la
raison, qui egaraient; on avait ete libertin, on se faisait devot; on
n'avait point passe par l'orgueil philosophique ni par l'impiete seche;
on ne s'etait pas attarde longuement dans les regions du doute; on ne
s'etait pas senti maintes fois defaillir a la poursuite de la verite.
Les sens charmaient l'ame pour eux-memes, et non comme une distraction
etourdissante et fougueuse, non par ennui et desespoir. Puis, quand on
avait epuise les desordres, les erreurs, et qu'on revenait a la verite
supreme, on trouvait un asile tout prepare, un confessionnal, un
oratoire, un cilice qui matait la chair; et l'on n'etait pas, comme
de nos jours, poursuivi encore, jusqu'au sein d'une foi vaguement
renaissante, par des doutes effrayants, d'eternelles obscurites et un
abime sans cesse ouvert:--je me trompe; il y eut un homme alors qui
eprouva tout cela, et il manqua en devenir fou: cet homme, c'etait
Pascal.
Septembre 1829.
J'ecrivais ceci la meme annee, la meme saison ou je composais le recueil
de Poesies, _les Consolations_, c'est-a-dire dans une veine prononcee
de sensibilite religieuse. Depuis j'ai encore ecrit sur La Fontaine
quelques pages qui se trouvent au tome VII des _Causeries du Lundi_, et
j'ai essaye d'y repondre aux dedains que M. de Lamartine avait prodigues
a ce charmant poete. Au reste, si La Fontaine, dans ces dernieres
annees, a ete bien legerement traite par un grand poete qui s'est
lui-meme juge par la, il a ete etudie, approfondi par de savants
critiques, et si approfondi meme qu'il est sorti d'entre leurs mains
comme transforme. J'en r
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