s XIV, d'abord admiree pour l'apparente et fastueuse
regularite qu'y afficha le monarque et que celebra Voltaire, puis trahie
dans son infirmite reelle par les Memoires de Dangeau, de la princesse
Palatine, et rapetissee a dessein par Lemontey, nous reparait chez
Saint-Simon vaste, encombree et flottante, dans une confusion qui n'est
pas sans grandeur et sans beaute, avec tous les rouages de plus en plus
inutiles de l'antique constitution abolie, avec tout ce que l'habitude
conserve de formes et de mouvements, meme apres que l'esprit et le sens
des choses ont disparu; deja sujette au bon plaisir despotique, mais mal
disciplinee encore a l'etiquette supreme qui finira par triompher. Or,
ceci bien pose, il est aise de retablir en leur vraie place et de voir
en leur vrai jour les hommes originaux du temps, qui, dans leur conduite
ou dans leurs oeuvres, ont fait autre chose que remplir le programme
du maitre. Sans cette connaissance generale, on court risque de les
considerer trop a part, et comme des etres etranges et accidentels.
C'est ce que les critiques du dernier siecle n'ont pas evite en parlant
de La Fontaine: ils l'ont trop isole et charge dans leurs portraits; ils
lui ont suppose une personnalite beaucoup plus entiere qu'il n'etait
besoin, eu egard a ses oeuvres, et l'ont imagine _bonhomme_ et _fablier_
outre mesure. Il leur etait bien plus facile de s'expliquer Racine
et Boileau, qui appartiennent a la partie reguliere et apparente de
l'epoque, et en sont la plus pure expression Litteraire.
[Note 20: Il ne faudrait pourtant pas mettre sur la meme ligne,
pour l'ensemble des travaux, La Curne de Sainte-Palaye, qui en a fait
D'immenses, et Tressan qui n'en a fait que de fort legers.]
Il y a des hommes qui, tout en suivant le mouvement general de leur
siecle, n'en conservent pas moins une individualite profonde et
indelebile: Moliere en est le plus eclatant exemple. Il en est d'autres
qui, sans aller dans le sens de ce mouvement general, et en montrant par
consequent une certaine originalite propre, en ont moins pourtant qu'ils
ne paraissent, bien qu'il puisse leur en rester beaucoup. Il entre dans
la maniere qui les distingue de leurs contemporains une grande part
d'imitation de l'age precedent; et, dans ce frappant contraste qu'ils
nous offrent avec ce qui les entoure, il faut savoir reconnaitre et
rabattre ce qui revient de droit a leurs devanciers. C'est parmi les
hommes de cet ordre que nous rangeons La Fontai
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